Les Etats-Unis se retournent contre les gardiens de la révolution 14.08.2007 |
![]() L'administration Bush a choisi de se retourner contre le corps des gardiens de la révolution à cause, comme le disent les autorités américaines, de son engagement croissant en Irak et en Afghanistan, et de son soutien aux extrémistes partout au Moyen-Orient, ajoutent les sources. Cette décision fait suite à la pression du Congrès sur l'administration pour durcir sa position contre Téhéran, et à la frustration des Américains devant l'inefficacité des résolutions de l'ONU contre le programme nucléaire de l'Iran, affirment les autorités. La dénomination des gardiens de la Révolution se fera en vertu du décret présidentiel 13224, que le président Bush a signé deux semaines après les attaques du 11 septembre 2001 pour entraver le financement du terrorisme. Elle autorise les Etats-Unis à identifier des individus, des affaires, des associations caritatives et des groupes extrémistes engagés dans des activités terroristes. Les gardiens de la révolution seraient la première branche militaire nationale à être inscrite dans la liste, ont affirmé les autorités américaines – une mesure fort peu commune parce qu'il s’agit d’une entité au sein d’un gouvernement, et non une organisation terroriste non gouvernementale typique. Le décret permet aux Etats-Unis de bloquer les actifs des terroristes et d'interrompre des opérations commerciales étrangères qui "fournissent soutien, services ou aide à des terroristes, ou s'associent à eux d'une manière ou d’une autre." Cette mesure reflète une escalade des tensions entre Washington et Téhéran sur des questions incluant l'Irak et les ambitions nucléaires de l'Iran. L'Iran est dans la liste du Département d'Etat des parrains du terrorisme d'Etat depuis 1984, mais au mois de mai les deux pays ont entamé leur premier dialogue formel en tête-à-tête au bout de 28 ans dans une réunion de diplomates à Bagdad. Le but principal de la nouvelle dénomination est de prendre des mesures contre le vaste réseau d'affaires des gardiens de la révolution, ainsi que contre les sociétés étrangères faisant des affaires en relation avec cette unité militaire et son personnel. L'administration à l'intention de répertorier beaucoup d'opérations financières des gardiens de la révolution. "Tous ceux qui traitent avec eux devront immédiatement réévaluer leurs actions", a déclaré un responsable américain familier du plan qui parlait sous condition d'anonymat parce que la décision n'a pas été annoncée. "Cela augmente les risques de ceux qui ont jusqu'à présent ignoré la liste croissante des sanctions contre les Iraniens. Cela fait comprendre à chacun ce que sont vraiment le CGR et les affaires qui lui sont liées. Cela supprime les excuses pour faire des affaires avec ces gens." Pendant des semaines, l'administration Bush a débattu pour savoir s'il fallait viser le corps des gardiens de la révolution dans sa totalité, ou seulement son aile, la Force Qods, que les responsables américains lient au flux croissant d'explosifs, de bombes de bord de route, de roquettes et d'autres armes arrivant aux milices chi'ites en Irak et aux Talibans en Afghanistan. La Force Qods soutient aussi des alliés chi'ites comme le Hezbollah au Liban et des mouvements sunnites comme le Hamas et le Jihad islamique palestiniens. Bien que les discussions se poursuivent au sein de l'administration, la décision initiale est de viser le corps des gardiens de la révolution dans sa totalité, selon les autorités américaines. L'administration n'a pas encore décidé quand elle annoncera la nouvelle mesure, mais les autorités ont dit préférer le faire avant l'Assemblée Générale de l'ONU qui se réunit le mois prochain, où les Etats-Unis ont l'intention d'augmenter la pression internationale sur l'Iran. Formé en 1979 et chargé à l'origine de protéger la seule théocratie moderne au monde, les gardiens de la révolution ont dirigé les batailles en Irak durant la guerre sanglante Iran-Irak de1980 à 1988. Les gardiens de la révolution, connu aussi sous le nom de pasdaran, sont devenus depuis une force politique et économique puissante en Iran. Le président iranien Mahmoud Ahmadinejad est monté en grade dans les rangs des gardiens de la révolution, arrivant au pouvoir avec le soutien de son réseau de vétérans. Ses dirigeants sont liés à beaucoup d'affaires de premier plan en Iran. "Ils sont lourdement impliqués dans toute sorte de choses allant des produits pharmaceutiques aux télécommunications et aux oléoducs – jusqu’au nouvel aéroport Imam Khomeiny et beaucoup de contrebande", selon Ray Takeyh du Conseil des Relations étrangères. "De nombreuses sociétés écrans engagées dans la fourniture de technologie nucléaire appartiennent aux gardiens de la révolution qui les gèrent. Ils se développent en suivant le modèle de l'armée chinoise, qui est impliquée dans beaucoup d'entreprises commerciales. C'est un gigantesque conglomérat d'affaires." Le corps gardiens de la révolution - avec sa propre marine, son armée de l'air, ses forces terrestres et ses unités spéciales - est un rival des troupes conventionnelles iraniennes. Ses forces navales ont enlevé 15 marins et fusiliers marins britanniques au printemps, déclenchant une crise internationale et ses forces spéciales ont armé le Hezbollah du Liban avec des missiles lancés contre Israël dans la guerre de 2006. Le corps joue aussi un rôle clef dans les industries militaires de l'Iran, y compris dans la tentative de se doter d'armes nucléaires et de missiles sol-sol, selon Anthony H. Cordesman du Centre d'Études Stratégiques et Internationales. Les Etats-Unis ont pris des mesures punitives contre l'Iran après la prise de l'ambassade américaine en novembre 1979 à Téhéran, dont la rupture des relations diplomatiques et le gel des avoirs iraniens aux Etats-Unis. Plus récemment, des dizaines de banques internationales et d'institutions financières ont réduit ou arrêtés leurs affaires avec l'Iran après une campagne discrète du Trésor et du Département d'Etat pour limiter l'accès de Téhéran au système financier international. L'an passé, deux résolutions de l'ONU ont visé les avoirs et les mouvements de 28 personnes - y compris des membres des gardiens de la révolution - liées au programme nucléaire de l'Iran. C’est la Chine, le plus grand partenaire commercial de l'Iran, qui a été un obstacle majeur à une pression internationale plus forte contre Téhéran. Après que le gouvernement iranien ait refusé de respecter deux résolutions de l'ONU du Conseil de sécurité sur son programme nucléaire, Pékin a rechigné à soutenir un projet de résolution américain qui aurait sanctionné les gardiens de la révolution, ont affirmé des autorités américaines. La Chine a opéré un changement lors d’un cycle où la Russie était la moins disposée parmi les membres exerçant un veto au Conseil de sécurité. "La Chine avait pour habitude de se cacher derrière la Russie, mais maintenant c’est la Russie qui se cache derrière la Chine", a dit un responsable américain familier des négociations. Cette mesure de l'administration survient alors que la loi anti-prolifération de l'Iran, présentée au Sénat par Gordon Smith (rép- Oregon) et à la Chambre par Tom Lantos (Dém -Californie) reçoit un soutien croissant au Congrès. Le projet de loi a déjà l'appui de 323 membres de la Chambre. Cette décision de l'administration pourrait endommager les efforts diplomatiques, pensent quelques analystes. "Elle compliquerait énormément nos efforts pour résoudre la question nucléaire", dit Joseph Cirincione, un expert en prolifération nucléaire au Center for American Progress. "Cela lierait la fin du programme nucléaire de l'Iran à la fin de son soutien à ses alliés du Hezbollah et du Hamas. La seule manière d'obtenir un accord nucléaire serait de le faire dans le cadre d'un grand accord, qui actuellement est totalement hors de portée." De telles sanctions ne peuvent être efficaces qu'avec des efforts diplomatiques, a ajouté Cirincione. "Les sanctions peuvent servir pour pousser, mais elles ont très rarement forcé un pays à capituler ou à s'effondrer", a-t-il dit. "Nous voulons tous acculer l'Iran dans un coin, mais nous voulons lui donner aussi une porte de secours. [La dénomination] en convaincra beaucoup dans l'élite en Iran que cela ne sert à rien de parler avec nous et que la seule chose qui peut nous satisfaire c'est un changement de régime." |
This article comes from Iran Focus (Francais)
http://www.iranfocus.com/french
Iran : Trois réactions au sommet des Pasdaran
19.08.2007
L’annonce américaine de l’inscription des Pasdaran sur la liste des entités terroristes suscite diverses réactions iraniennes.
1ère réaction | En Iran, le Général-milicien Yahya Rahim-Safavi, l’actuel commandant des Pasdaran, est allé droit au but en déclarant que l’occident devait « accepter l’influence et la puissance de l’Iran dans la région du Moyen-Orient et observer les droits de l’Iran ».
Cette réaction confirme notre analyse quant aux raisons profondes de la décision américaine à propos des Pasdaran : les Etats-Unis veulent diminuer l’influence régionale de cette milice polymorphe (sa capacité de nuisance) afin de diminuer les prétentions régionales du régime des mollahs qui exigent une reconnaissance américaine de cette influence avérée, aussi bien au Liban qu’en Palestine.
Rahim-Safavi, qui est une brute épaisse, s’est exprimé très directement alors que les autres dirigeants du régime évitent d’aborder le sujet aussi directement car ils préfèrent se dire victimes de la malveillance américaine. Rahim-Safavi est allé encore plus loin en déclarant que les puissances occidentales devaient « comprendre que l’établissement de la sécurité dans la région sans observer les droits de l’Iran n’était désormais plus possible ». C’est sans doute, la réaction qui prévaut à Téhéran dans le cœur des dirigeants, mais ils sont moins primaires que Rahim-Safavi et ne l’expriment pas en ces termes aussi limpides.
2nde réaction | Le Général-milicien Firouz-Abadi, un membre des Pasdaran qui est l’actuel commandant des Bassidjis, est resté dans la limite des slogans chers au régime pour exprimer sa colère. Il a qualifié la décision d’illogique et hâtive, et il a déclaré que cette décision contribuerait à renforcer la popularité des Pasdaran parmi tous les musulmans et même que l’étendard des Pasdaran deviendra comme celui du Hezbollah, le drapeau de tous les peuples de la planète. C’est généralement ce que le régime demande à ses miliciens haut placés : des slogans islamistes et non pas des déclarations sur la politique internationale du régime comme l’a fait Rahim-Safavi dans un moment de colère sincère.
3ème réaction | Dans un registre différent, l’AFP a interrogé Mohsen Sazgara, le fondateur des Pasdaran. Selon l’AFP, Sazgara est le plus célèbre des dissidents iraniens et un chercheur, mais pour nous il est l’un des plus emblématiques faux-opposant iraniens. Depuis qu’il réside aux Etats-Unis ce chercheur n’a rien publié sur le seul sujet qu’il maîtrise, c’est-à-dire les Pasdaran, cette milice qui a participé à tant d’attentats anti-américains ou anti-juifs. Le livre aurait été un succès phénoménal. Mais Sazgara n’a pas délivré ses secrets et il a ainsi évité consciencieusement un sujet qui aurait pu nuire au régime des mollahs et aurait rendu impossible toute reprise du dialogue entre Téhéran et Washington.
Dans son rôle de faux opposant, Sazgara doit uniquement agir dans le sens d’une reprise du dialogue entre les Américains et les mollahs et ce afin de faire normaliser les relations entre les deux Etats. Dans son interview AFP pour convaincre ses interlocuteurs, Sazgara a d’abord amplifié les rumeurs sur les super-capacités de nuisance des Pasdaran pour ensuite recommander le dialogue pour dénouer la situation [1]. Jusqu’à dans sa façon de faire du lobbying, Sazgara reste le modèle absolu d’officier de renseignement des Pasdaran.
C’est bien pour cette raison qu’il a été envoyé aux Etats-Unis à la place d’un Rahim-Safavi. C’est ce qui fait la force de cette milice polymorphe, elle a plusieurs niveaux de direction et une hiérarchie invisible dans laquelle Sazgara se trouve bien plus haut que Rahim-Safavi.
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| Mots Clefs | Institutions : Pasdaran, Gardiens de la Révolution |
[1] Sazgara, l’homme du dialogue | Tout devrait passer par la négociation. (AFP) |
