Barack Obama à pleine vitesse dans la cavalcade effrénée de la Naïveté
Par Barry Rubin
6 Mars 2011
Adapté par Marc Brzustowski
Pour © 2011 lessakele et © 2011 aschkel.info
Avec l’aimable autorisation de Yeru Aharoni
Directeur des Publications/Rédacteur en chef du
Global Research in International Affairs (GLORIA)
Center Interdisciplinary Center
http://www.gloria-center.org/gloria/2011/03/barack-obama-and-the-cavalcade-of-naivete
Le Président Barack Obama a déclaré, face aux contributeurs du Parti Démocrate, à Miami :
“Lorsque vous voyez ce qui est en train d’arriver… au Moyen-Orient, on assiste à une manifestation à partir des nouvelles technologies, les vents de la liberté qui soufflent à travers des pays qui n’ont pas ressenti ces vents durant des décennies, une nouvelle génération entière qui dit vouloir faire partie de ce monde. Ce sont des temps dangereux, mais il s’agit aussi d’une vaste opportunité pour nous ».
Obama a également affirmé que les Etats-Unis ne devaient pas être “effrayés” de ces changements au Moyen-Orient. Et bien, cela dépend du genre de changements dont on parle, n’est-ce pas? Je ne serais pas effrayé si l’Iran, la Syrie et la Bande de Gaza vivaient des soulèvements révolutionnaires qui instaureraient des gouvernements démocratiques modérés, par exemple.
Mais laissez-moi vous rappeler une fois encore, le sujet que j’évoquais dès le premier jour de la revolution égyptienne, et qui disait que je me sentais préoccupé parce que d’autres, précisément, ne sont pas dérangés. Plus ils démontrent qu’ils ne comprennent pas les dangers, plus importants deviennent ces dangers.
Le Président Franklin Roosevelt avait déclaré, à propos de la Grande Dépression, “qu’il n’y avait rien dont il ne fallait avoir peur, sinon de la peur elle-même ». Ce qui veut dire que, les Américains devraient avoir confiance en leur capacité à résoudre les problèmes. Mais il n’a pas dit, lorsque les forces allemandes envahissaient un pays après l’autre, que les Américains ne devraient pas s’effrayer des changements en cours en Europe. Pas plus qu’il n’a dit, alors que l’empire japonais étendait son hégémonie, que les Américains ne devraient pas redouter les changements en Asie.
Le Président Harry Truman n’a pas dit que les Américains ne devraient pas avoir peur des changements dans l’Est de l’Europe, lorsque les Soviétiques y prirent le pouvoir à la place des gouvernements antérieurs ni lorsque la Chine devint communiste.
Ces présidents (pourtant, eux aussi, démocrates) reconnaissaient la nature du danger et travaillaient afin de le contrer du mieux qui’ls le pouvaient en ces circonstances.
Par contraste, tout en admettant du bout des lèvres qu’il s’agit “de temps dangereux”, Obama ne met jamais le doigt sur la nature de ces dangers, franchement, parce qu’il n’en a aucune idée. Toutes les remarques qu’il fait, à propos de ces changements, sont positives, menées tambour battant.
Mais encore, s’il avait raison, pourquoi donc les Etats-Unis ne souhaitent-ils pas que plusieurs régimes – l’Arabie Saoudite, la Jordanie, l’Autorité Palestinienne – soient également renversés ? Pourquoi ne fait-il pas une claire distinction entre les ennemis et les amis de l’Amérique ?
Afin de montrer qui est vraiment naïf, il a ajouté :
“Toutes les forces que nous voyons se construire en Egypte sont des mouvements qui devraient naturellement s’aligner sur nous. Qui devraient être compatibles avec Israël ».
Toutes les forces devraient être compatibles avec les Etats-Unis et Israël! Très bien ! Peut-être “devraient-elles” l’être, mais elles ne le sont pas, à l’heure qu’il est. En fait, c’est même plutôt totalement le contraire : toutes les forces que nous voyons émerger en Egypte sont des forces qui, en fait, ne sont pas du tout compatibles avec les Etats-Unis et Israël. C’est là que nous constatons l’arrogance de quelqu’un qui dit aux peuples d’autres pays ce qu’ils « devraient » penser, au lieu d’analyser ce qu’ils pensent exactement.
Bien évidemment, ce qui arrive – et nous assistons à cela Presque in vivo – c’est que les agences de renseignement et les medias réécrivent la réalité pour faire croire que ces gens sont des modérés, précisément, parce que c’est que le Président espèrent au fond de lui.
Voici quelques parallèles historiques qui illustrent les déclarations d’Obama (c’est moi qui les ai relevés) :
En 1932 : l’Allemagne aurait dû s’aligner sur les démocraties occidentales et les Etats-Unis, parce que c’est la seule voie qui aurait permis d’accomplir la prospérité et la stabilité en Europe, deux choses don’t les Allemands avaient désespérément besoin. Ce n’est que 14 ans plus tard, que l’Allemagne a fini par perdre une longue guerre extrêmement sanglante. Certainement, les Allemands n’ont pas le moindre désir de se battre de cette façon une fois encore, ni de répéter leur erreur de tenter de conquérir l’Europe !
1945 : l’Union Soviétique aurait dû s’aligner sur les démocraties occidentales et les Etats-Unis, puisque, justement, nous venions juste d’être allies au cours d’une guerre épouvantable. Moscou aurait dû comprendre que les Etats-Unis n’avaient aucun désir de l’offenser, voulaient vivre en paix, et respecter les intérêts soviétiques. Certainement, Staline mettrait l’accent sutr la reconstruction de son pays et pas le moins du monde sur l’expansionnisme à l’extérieur de ses frontières!
1979 : le nouveau régime islamiste en Iran aurait dû s’aligner sur l’Occident et les Etats-Unis, parce qu’ils acceptaient sa révolution chez lui, souhaitaient de bonnes relations et sont les consommateurs naturels des exportations de pétrole iranien.
1989 : Saddam Hussein et son régime irakien auraient dû s’aligner sur l’Occident et les Etats-Unis, parce que ceux-ci l’avaient soutenu Durant sa dernière guerre contre l’Iran et que le monde redoutait l’extension de l’islamisme révolutionnaire. Saddam ne provoquerait aucun problème et mettrait la priorité sur la reconstruction de son pays, après une guerre sanglante longue de huit années contre l’Iran et apporterait une vie meilleure à son peuple.
1993 : Yasser Arafat et les Palestiniens auraient dû s’aligner sur les Etats-Unis et être impatients de réaliser une paix faite de compréhension avec Israël, alors que c’était la seule voie par laquelle ils pouvaient obtenir un Etat à eux. A présent qu’ils sont sur le point de disposer d’élections et d’être responsables de l’administration de la Bande Occidentale et de la Bande de Gaza, il est certain que l’OLP ne pourra que cesser d’être révolutionnaire ou terroriste.
Vous êtes prêts à accepter cette vision ?
Et, de même, lorsqu’Obama déclare :
“Je suis effectivement confiant dans le fait que, dans dix ans d’ici, nous pourrons regarder en arrière et dire que c’était l’aube d’une ère totalement nouvelle et tellement meilleure. L’une durant laquelle les gens s’efforcent, non pas, de se dresser contre quelque chose, mais, au contraire, afin d’être pour quelque chose ».
Souvenez-vous de ces paroles. Il n’a absolument aucune compréhension du monde arabe, du monde à majorité musulmane, ni du Moyen-Orient en quoi que ce soit.
Comment ces nouveaux régimes vont-ils pouvoir se maintenir en place, tenir leurs rivaux à distance, et se constituer pour être en capacité de fournir les produits dont leurs peuples ont besoin ? Quelle est la vision du monde de ces forces nouvelles ? De quelle façon perçoivent-elles l’Amérique, l’Occident, et Israël ? Telles sont les questions que nous devons nous poser et auxquelles nous devons instamment répondre, si l’on veut vraiment comprendre à quoi ressemblera le monde dans une décennie d’ici.
Barry Rubin est directeur du Centre pour la Recherche Globale en affaires internationales (GLORIA) et éditeur du journal : la revue des Affaires Internationales et du Moyen-Orient (MERIA). Ses derniers ouvrages sont « le lecteur israélo-arabe (7è édition), La longue guerre pour la liberté : la lutte arabe pour la démocratie au Moyen-Orient (Wiley), ainsi que La vérité sur la Syrie (Palgrave-McMillan). Le site internet du Centre GLORIA est à l’adresse : http://www.gloria-center.org et celle de son blog, Rubin Reports, à :http://www.rubinreports.blogspot.com.