Lors de ce 8 ème et dernier entretien estival (mais, rassurez-vous, il y en aura beaucoup d'autres, l'automne ayant fait son entrée dans nos chaumières!), Bonapartine fait référence à deux précédents articles parus sur Lessakele :
- notre première conversation, où il est fait référence au fameux "apéro saucisson-pinard" du 18 juin :
1- « Conversations estivales »
et à l'entretien que nous a accordé le Dr Emmanuel Navon, le 15 juillet dernier :
http://lessakele.over-blog.fr/article-entretien-avec-emmanuel-navon-53972000.html
Certains de vos anciens « amis » politiques ne ménagent pas leurs efforts pour rallier le Hamas et tirer à boulets verts et rouges sur tout ce qui dévie de leur idéologie dominante au point de verser dans une propagande nuisible à Israël. Qu’est-ce que cela vous inspire ? D’où vient le litige ou le divorce ?
Dans l’Europe ouverte, quels comptes tente t- on de régler avec les questions nationales, à travers cette attitude de défiance envers l’Etat-nation d’Israël, en Orient ?
Des amis, oui, je pense qu’ils l’ont été par le passé. Ceci dit, quand vous dites "vos amis", il s’agit là d’anciens amis de Riposte Laïque, en aucun cas des miens dès l’instant où je n’ai pas personnellement vécu cette période qui fut probablement sereine entre Mohamed Sifaoui, Caroline Fourest et le journal en ligne, n’étant pas moi-même à l’époque contributrice de Riposte Laïque. Quant à dire que les amis en question auraient été pour autant des amis "politiques" de Riposte Laïque, çà je ne le garantirai pas forcément non plus. En effet, le journal est ouvert aussi bien aux républicains de gauche que de droite. Or, c’est un euphémisme que de dire que nombre de ceux qui se réclament "de gauche" aujourd’hui restent intellectuellement enfermés dans un clivage strict droite/gauche qui n’est pas forcément encore et toujours d’actualité dans le monde complexe et globalisé qui est le nôtre. Maintenant, il ne m’appartient pas non plus de me prononcer en lieu et place des rédacteurs, contributeurs ou sympathisants de Riposte Laïque sur le sujet. Je ne m’avance donc pas davantage sur ce terrain.
En tout état de cause, Mohamed Sifaoui par exemple, partage des idées politiques de gauche que je respecte profondément, mais qui ne correspondent pas aux miennes. Non pas que je rejette en quoi que ce soit les idées de gauche. Simplement, pour moi qui ait été élevée, et ce n’est du reste d’ailleurs pas le moindre des paradoxes, dans un milieu profondément nourri des idées et valeurs d’une gauche ultra laïque, rigoureuse pour ne pas dire rigoriste, mais où l’on n’omettait jamais en même temps de garder un œil ouvert sur ce qu’avait été l’œuvre de Bonaparte – c’est dire comme c’est déjà pour le moins on ne peut plus original ! -, je ne vous cache pas que la gauche française depuis 1981, toutes sensibilités confondues, ne reflète en rien les idéaux de gauche. Pour moi et sans nullement vouloir verser dans le registre passéiste aussi ridicule que désuet des inconsolables nostalgiques qui vous répètent à l’envie "En ce temps là, tout était parfait alors qu’aujourd’hui tout est nul", la gauche, c’est Jules Ferry, Emile Combes, Léon Gambetta, Aristide Briand, Jean Jaurès, Clemenceau, Léon Blum, Mendès France. Mais en tout état de cause, il est évident dans mon esprit que les François Mitterrand, Attali, Dumas, Martine Aubry, Ségolène Royal, Laurent Fabius, Rebsamen et Cie ne sont pas les dignes héritiers de la gauche dont je parle …. Quand j’entends, par exemple, Jean-Pierre Chevènement déclarer récemment au Centre culturel français d’Oran, au cours d’une conférence intitulée "République, laïcité et religions", que "si la laïcité est tolérante, l’Islam est à même de comprendre cela, ce qui n’est pas le cas du catholicisme". Etre laïc et de gauche consisterait-il donc à s’inscrire désormais dans une démarche plus sournoise qui serait de dresser une religion contre une autre ? Non, décidément, cette gauche fait honte à nombre de citoyens sincèrement attachés aux idéaux de gauche dans ce pays, a-fortiori quand ils sont catholiques et votent à gauche. Mais comment expliquer cela à un Jean-Pierre Chevènement qui n’a pas compris que les équilibres de ce monde ont été radicalement bouleversés, surtout depuis la Chute du Mur de Berlin ? Enfin, n’est-ce pas une forme de racisme que de rétrograder ainsi la religion catholique à qui on peut reprocher sans doute, comme à toute religion du reste, de ne pas vouloir ou de ne pas avoir la capacité d’évoluer avec son temps mais qui, elle, a au moins l’immense mérite de ne pas lancer régulièrement des appels au meurtre contre des personnes morales ou physiques sur la place publique d’une grande ville française ou par vidéos interposées !
Monsieur Chevènement appartient à autre époque, celle où les laïcs témoignaient majoritairement d’un anticléricalisme primaire. Mais ce temps-là est révolu et nous devons nous féliciter que l’Eglise catholique romaine ne soit plus dans une logique de guerre civile avec les laïcs de France. De fait, je crois très sincèrement que c’est être complètement à côté de la plaque que d’imaginer un seul instant que l’Eglise catholique romaine nourrirait un tant soit peu encore, en 2010, le rêve secret de remettre en cause la Loi de Séparation des Eglise et de l’Etat de 1905. Non, n’en doutez pas, l’Eglise n’est pas stupide au point de tenter de se convaincre qu’elle aurait, au jour d’aujourd’hui, un intérêt quelconque à réveiller les braises d’une guerre civile en France, de surcroît après avoir mis tant de décennies à coexister en bonne entente avec des laïcs et mis des siècles à vivre en bonne harmonie avec d’autres religions.
Revenons donc désormais à ceux que vous qualifiez, non sans une certaine ironie au demeurant justifiée, de nos "anciens amis". Il est vrai que nous avons, principalement depuis le mois de juin 2009, été attaqués par des personnes avec qui nous avions sans doute des divergences de points de vue mais que nous ne connaissions pas comme étant des adversaires prêts à lancer à notre encontre des fatwas d’une violence inouïe, notamment venant de Caroline Fourest, Caroline Brancher (Prochoix) ou de Mohamed Sifaoui.
Riposte Laïque a du reste été également la cible de certains francs-maçons du Grand Orient de France, je dis bien "certains" car fort heureusement je suis loin d’ignorer qu’ils ne sont pas tous gangrénés par le politiquement correct ni envoûtés par les sirènes de la bien pensance de nature à les faire sombrer dans les écuelles de la diffamation gratuite, qui n’ont rien trouvé "de mieux", au début du mois de juin 2010, que de taxer Riposte Laïque de "site antisémite". Le comble du grotesque avait alors été atteint. Tellement atteint qu’aucun de ces charmants censeurs autoproclamés n’a jamais été en mesure d’apporter la moindre preuve d’antisémitisme sur Riposte Laïque. Et pour cause, il n’y en pas puisque, par définition, personne n’a jamais été victime d’antisémitisme sur l’équipe, aussi bien à l’encontre de rédacteurs que de contributeurs ou de quiconque d’autre. Non seulement je l’affirme mais j’en ai également les preuves. Donc, sur ce point, j’invite chacun de ceux qui s’aventureraient à l’avenir sur ce terrain par nature accidenté, francs-maçons ou pas, de bien vouloir calmer d’emblée leurs nerfs. Encore une fois, on peut avoir des différences d’appréciation, des divergences d’opinion, voire des conflits sur les alliances à nouer avec tel ou tel, ce qui fut mon cas et que je n’ai jamais caché puisque je l’ai exprimé sur votre blog dès le début de cet entretien au mois de juillet 2010 ((1 ICI) L’épisode de l’apéro saucisson-pinard) mais çà n’autorise pas pour autant à affirmer n’importe quoi, en se vautrant en prime dans le registre de l’infâme ! C’est avec ce genre de procédé on ne peut plus douteux que l’on ouvre les vannes des portes de l’impunité la plus complète aux pires extrémistes que compte hélas en son sein toute société, les vrais ceux-là, et qu’ensuite des personnes se retrouvent publiquement menacées de mort. J’en veux pour preuve encore récemment l’excité de barbu qui, à Limoges, n’a pas hésité à proférer, en place publique, des menaces contre Riposte Laïque, Christine Tasin puis, pour clore le tout, à piétiner à coups de pieds sur un trottoir le Code pénal français. De quoi tuer une seconde fois Napoléon Bonaparte. Mais c’est vrai que dans un pays, la France, où notre héritage culturel perd un peu plus chaque jour du terrain, sans doute tout ceci n’a-t-il, au fond, que bien peu d’importance aux yeux de ceux qui dépensent tant d’énergie à inverser les rôles : au rythme où vont les choses en effet, si cela continue, Riposte Laïque sera un journal définitivement catalogué de "néo-nazi" et les barbus deviendront les "authentiques" républicains et démocrates de France. Autant dire, le monde à l’envers ! Tellement le monde à l’envers qu’on se demande où était par exemple la police à Limoges pendant que ce fou d’Allah a foulé au pied et pendant un bon quart d’heure nos valeurs universelles, appelé à la haine envers les Juifs ("Nous sommes antisémites et fiers de l’être"), insulté le C.F.C.M, menacé la liberté d’expression dont use à juste droit un journal en ligne, enfin condamné ouvertement la politique menée par le gouvernement français en Afghanistan ? C’est quand même dire si le dossier est chargé ! Que fait par ailleurs le Culte musulman français ? On ne l’entend pas condamner cette vidéo. Pourquoi ce silence ? Et où sont tous les antiracistes de S.O.S Racisme ? Où est Mohamed Sifaoui qui s’échine à faire de la publicité pour son dernier ouvrage à paraître à la fin du mois de septembre "Al–Qaïda Maghreb islamique, le groupe terroriste qui menace la France" mais qui, dans le même temps, témoigne d’un attentisme effrayant devant l’expression d’un barbu qui ressemble à s’y méprendre à ceux qu’il pointe légitimement du doigt dans son dernier ouvrage ? Enfin, le plus grave à mon avis dans cette affaire : pourquoi la police n’a-t-elle pas bougé ?
Dans ces circonstances et devant la gravité du préjudice moral porté à Riposte Laïque, vous comprendrez que je ne puisse pas retracer l’évolution des discours et comportements haineux de chacun, au risque de leur accorder une place et une importance bien inutiles, voire déplacées. Néanmoins, permettez-moi de prendre un seul exemple afin de permettre aux lecteurs de comprendre les développements ultérieurs du présent article : celui de Mohamed Sifaoui. Les relations entre Mohamed Sifaoui et Riposte Laïque ressemblent à s’y méprendre à un mélodrame, pathétique par définition, mais dont Mohamed Sifaoui est hélas le principal initiateur. Voyons donc :
Ø Acte 1 - Le 09.12.06 : Michèle Vianès, présidente de l’Association "Regards de femmes", organise une manifestation contre la venue de Hani Ramadan prévue dans les locaux de la librairie Tahwid à Lyon. Très honnêtement, quand on écoute la vidéo de la conférence, le discours de Mohamed Sifaoui est non seulement en phase avec celui de Pierre Cassen, mais à bien des égards leurs discours respectifs sont complémentaires l’un de l’autre.
Ø Acte 2 - Le 15.02.08, dans un article intitulé "Nécessaire mise au point", apparaît une première ombre au tableau. Mohamed Sifaoui, sous prétexte d’être en désaccord avec le soutien ouvert et actif apporté par Riposte Laïque à Ayaan Hirsi Ali, annonce en fait sa prise de distance et ses règlements de comptes à venir avec le journal : « Le site de "Riposte Laïque" animé par notre "ami" Pierre Cassen a donné son point de vue sur la soirée de soutien organisé en faveur d’Ayaan Hirsi Ali. ……. Je l’ai écrit, dit et répété : Ayaan Hirsi Ali doit être soutenue. …… Je ne la soutiens pas enfin comme Rama Yade qui, tout en supportant un discours présidentiel inquiétant sur la question de la laïcité, voit dans la présence d’Ayaan Hirsi Ali à Paris le "coup de comm" qu’il ne faut surtout pas laisser passer. ……. Ce qui me pousse à dire que tout ce que dit cette femme à l’égard de l’islam est d’une niaiserie rare …. » Monsieur Sifaoui recourt dès février 2008 à une technique d’expression qu’il n’abandonnera plus jamais : il cite un nom qui n’est autre qu’une cible, en l’occurrence l’"ami" Cassen pour ensuite, en vérité, taper sur d’autres personnalités ou d’autres manières de pensée. Ici, il s’en prend notamment à Rama Yade qu’il n’apprécie pas, non pas en raison de ses idées politiques ou du soutien apporté à Ayann Hirsi Ali, mais en réalité parce qu’elle appartient à un gouvernement dont il n’apprécie pas l’orientation politique. C’est par ailleurs le droit le plus absolu de Mohamed Sifaoui de ne pas soutenir l’orientation politique du gouvernement de Nicolas Sarkozy. Et je le dis d’autant plus tranquillement qu’en 2007, je n’ai rien mis dans l’enveloppe déposée dans l’urne du bureau de vote au second tour de l’élection présidentielle.
Ø Acte 3 - Fin juin 2009 : Caroline Fourest lance une charge virulente, sous la plume de Caroline Brancher, dans un numéro de Prochoix sous le titre "Riposte Laïque : analyse d’une stratégie", puis une seconde salve tout aussi virulente, en juin 2010, dans un numéro intitulé "Apéro Saucisson, Les liaisons dangereuses". A partir de septembre 2009, il semble qu’il y ait, à l’analyse objective des écrits de Mohamed Sifaoui que j’étudie avec beaucoup de sérieux, de rigueur et d’acuité, un calque quasi parfait, voire une influence directe du discours de Caroline Fourest sur celui de Mohamed Sifaoui. Mohamed Sifaoui ne manquant d’ailleurs jamais une occasion de passer dans chacun de ses écrits, un peu plus à chaque fois, la brosse à reluire à Caroline Fourest.
Ø Acte 4 - Survient alors l’épisode de l’arraisonnement du Mavi Marmara par l’armée israélienne, en mai 2010, dont chacun sait que les occupants étaient loin d’être tous des humanitaires inoffensifs. A partir de là, Mohamed Sifaoui rédige un article d’une violence jamais égalée, "Le petit Netanyahu" (1er juin 2010) dans lequel il fait porter l’entière responsabilité de "l’interception meurtrière de la flottille" au Premier ministre de l’Etat d’Israël. Que devient dans l’histoire, Ehud Barak, pourtant Ministre de la Défense ? On ne sait. Monsieur Sifaoui ne prend pas même soin de le citer, ce qui démontre bien, une fois encore, l’orientation parfaitement calculée de Mohamed Sifaoui qui inscrit l’acte d’écriture et donc sa démarche de pensée non pas dans le cadre d’un débat basé sur un raisonnement argumenté, mais qui s’enferme systématiquement dans les seules frontières du réquisitoire dressé contre une personne en particulier, dont l’objectif est d’attirer l’attention d’une certaine caste de pensée qui consacre les ¾ de son temps à dicter à qui veut l’entendre comment chacun de nous doit penser, ce qu’il doit penser de qui et de quoi, ce que nous devons manger, comment nous devons nous habiller, qui nous devons fréquenter, où et quand et, à ce rythme là, ce seront bientôt les mêmes qui nous dicteront encore des codes de conduite pour nous dire qui nous devons aimer, où, voire comment nous devons aimer …… Cela, Mohamed Sifaoui l’a très bien compris. Il en use et en abuse. Personne n’ignore en effet qu’un journaliste, un intellectuel, un artiste ne risquent rien à cogner sur Israël en France, en 2010, mais qu’à l’inverse, il serait bien plus risqué de s’aviser à contester la politique de l’Algérie par exemple à l’encontre des Chrétiens. Alors, que fait Monsieur Sifaoui ? Il attire l’attention sur lui en écrivant sur des "thèmes porteurs" en France !
Chacun de nous peut aisément l’observer et vous avez, à ce titre, entièrement raison de préciser dans votre question initiale que ceux qui tirent à boulets rouges sur des interlocuteurs qui ne pensent pas exactement comme eux ou sur Israël, "rallient le Hamas". Effectivement, à force de dénigrer un Etat démocratique, Israël, qui ne compte pas se laisser dicter sa conduite par quiconque d’autre que par lui-même en matière de lutte contre le terrorisme, on finit par se radicaliser au point de ressembler à ceux que l’on prétend combattre en qualité de "musulman modéré". Ce qui est le cas de Mohamed Sifaoui. Prenons un exemple concret sur ce point précis : le Likoud vu par Mohamed Sifaoui.
Le Likoud, c’est par définition le monstre à abattre aux yeux de Mohamed Sifaoui. Il n’a, à l’évidence, que de vagues connaissances sur l’histoire de ce parti politique israélien. Mais peu importe, il le voit partout même là où il n’est pas, tout comme jadis les nazis ou les pétainistes imaginaient des Juifs partout et surtout dans des endroits où ils n’étaient pas. Mieux si j’ose dire, le Likoud vu par Sifaoui aurait en quelque sorte le visage d’une bête immonde, à en croire ses écrits. Mais d’une bête immonde qu’il cite malgré tout rarement expressément. Mohamed Sifaoui préfère privilégier le recours au terme vague de "l’extrême-droite" israélienne, faute d’avoir une idée précise de la réalité que recouvre la dite extrême-droite israélienne.
Monsieur Sifaoui suit-il au moins un instant l’actualité politique en Israël, condition la plus élémentaire, me semble-t-il, pour disposer de tous les outils nécessaires à l’analyse d’un dossier, quel qu’il soit ?
Et dans l’hypothèse où Mohamed Sifaoui aurait eu la présence d’esprit de se pencher un tant soit peu sur l’actualité politique israélienne, la comprend-t-il ? Non. Pourquoi ? Un seul exemple illustratif pour en témoigner : la candidature d’Emmanuel Navon, candidat à la Knessetinscrit sur la liste du Likoud en vue de représenter la communauté francophone présente en Israël et forte d’un demi- million de personnes.
Né à Paris en 1971, Emmanuel Navon a fait son alyah en Israël en 1993. Il a occupé un poste au Ministère des Affaires étrangères français ainsi qu’au Ministère du budget. Enseignant en relations internationales à l’Université de Tel Aviv, également diplômé de l’Université hébraïque de Jérusalem, expert d’un cabinet de conseil, vice-président d’une société d’investissement où il a contribué à renforcer la présence des francophones, Emmanuel Navon a donné une interview au blog Lessakele au début de l’été (2 : http://lessakele.over-blog.fr/article-entretien-avec-emmanuel-navon-53972000.html).
Je ne vais pas ici reprendre tous les propos d’Emmanuel Navon, au risque d’allonger inconsidérément le présent article et afin de ne pas me détourner du sujet d’origine. Je consacrerai prochainement un très long article à la candidature d’Emmanuel Navon.
Non, dans l’immédiat, je me limite à ne citer qu’un seul exemple illustratif de ce que Mohamed Sifaoui considèrerait probablement comme "futur potentiel candidat fasciste". Jugez plutôt par vous-même.
Parmi les principaux sujets abordés par Monsieur Navon se trouve celui du projet maintes fois évoqué, notamment par Ben Gourion mais jamais réalisé en Israël et pourtant fondamental pour l’avenir du pays : la réforme du système électoral qui permettrait de passer d’un système d’élection à la proportionnelle à un scrutin majoritaire.
Voici donc ce que dit Monsieur Navon :
« … je ne crois pas aux petits partis. Je crois qu’Israël souffre d’un système politique qui est trop écartelé politiquement. Nous avons trop de partis à la Knesset et cela est crée par la fait que nous avons un système électoral proportionnel pour un système aberrant qui ne fonctionne nulle part …….Je pense qu’il faut passer à un système comme dans presque tous les pays démocratiques au monde, d’élection majoritaire pour avoir deux ou trois partis au maximum à la Knesset ….. Je crois qu’on ne peut gouverner aujourd’hui que par l’intermédiaire de grands partis. Le Likoud est à la fois un parti qui a une tradition libérale et nationale. C’est un parti qui regroupe de nombreuses franges de la société israélienne. C’est un véritable parti populaire …. »
En résumé, Emmanuel Navon propose tout simplement qu’Israël abandonne un mode de scrutin qui n’a fait ses preuves nulle part dans le monde, à commencer par la France où il a conduit à créer une instabilité politique chronique sous les IIIème et IVème Républiques. Très objectivement, c’est là le discours d’un démocrate que j’espère voir élu à la Knesset d’ici quelques mois. En aucun cas le discours d’un "extrémiste de droite". Mais allez donc savoir si, en lisant l’extrait choisi précédemment de l’interview d’Emmanuel Navon, Monsieur Sifaoui ne confonde "parti populaire" avec "un courant populiste" …
Alors, quelle analyse peut-on avoir de l’évolution de discours intellectuellement déviants qui, à un moment ou à un autre et à force d’être assénés à longueur de colonnes et d’antennes télévisées ou radiophoniques, finiront par mettre éventuellement en danger la vie d’autrui ?
Dans une interview donnée à Radio Chalom Nitsan le 1er juillet 2010, Paul Landau répondait, à la question "Qu’est-ce qu’il y a, selon vous, qui a fait qu’aujourd’hui Sifaoui a non pas peut-être changé de bord parce qu’il a toujours été de ce bord là mais en tout cas, il s’est lâché comme on peut dire, il laisse parler son cœur …." :
« Oui, alors écoutez, il y a plusieurs éléments de réponse. Il y a sûrement des éléments personnels parce que c’est vrai, c’est pas facile d’être un musulman anti-islamiste ; c’est quasiment une position intenable pour résoudre cette contradiction, il faut soit abjurer l’islam et c’est très mal vu, on le sait dans l’islam ; ce qu’ont courageusement fait d’ailleurs beaucoup, enfin beaucoup, quelques musulmans qui sont véritablement des militants anti-islamistes qui ont abjuré leur foi …… Maintenant, il y a un problème de fond sur lequel je m’étais penché déjà il y a plusieurs années quand j’avais commencé mes recherches sur l’islamisme en Europe ; c’est le fait que beaucoup d’islamologues en France ne sont pas favorables à Israël, c’est le moins que l’on puisse dire. Et en général, je dirais qu’Israël, c’est un petit peu le point noir dans leur attitude, dans leur raisonnement ou dans leurs recherches. Si vous lisez les travaux de Gilles Kepel ou Olivier Roy, vous constatez que tout en étant très lucides sur le phénomène islamiste, notamment dans le cas de Kepel qui est sans doute l’un des plus grands islamologues français, dès qu’il est question d’Israël ou du Hamas, alors là tout de suite çà dérape. Soit c’est un silence gêné soit ce sont des remarques qui sont tout à fait désobligeantes ….. dès qu’il s’agit d’Israël et des Juifs, alors les islamologues français et c’est le cas aussi dans d’autres pays, tout d’un coup abandonnent leur objectivité …. c’est un peu le même problème que l’on retrouve chez Caroline Fourest et Mohamed Sifaoui, c’est-à-dire que ce sont des gens qui combattent l’islamisme, qui sont connus comme des combattants anti-islamistes et soudain quand apparaît la question d’Israël, alors là tout d’un coup ils changent tout à fait d’attitude. …. Aujourd’hui et d’ailleurs c’est aussi une raison pour laquelle j’ai contribué au site Riposte Laïque alors qu’au départ, j’étais plutôt, si vous voulez, je m’intéressais à l’islamisme en tant qu’idéologie et pas au problème de l’islam en tant que tel, j’ai considéré que malgré tout, on ne pouvait faire l’impasse, c’est-à-dire qu’on ne pouvait considérer qu’il y avait uniquement un problème islamiste comme c’était d’ailleurs un petit peu mon cas il y a quelques années en distinguant soigneusement l’islam en tant que religion et civilisation, et puis l’islamisme en tant qu’idéologie politique alors. Aujourd’hui, on voit bien que les choses sont quand même plus complexes et on voit bien ce qui est en train de se passer en France dans les rues de Paris, tous les vendredis et pas seulement de Paris, une islamisation progressive de la société française et face à çà, très peu de résistance. On voit aussi des gens comme Sifaoui et Fourest qui critiquent l’islamisme mais qui se gardent bien de critiquer l’islamisation. Au contraire, ils réservent leurs attaques les plus virulentes aux gens qui s’opposent à l’islamisation, par exemple comme les gens de Riposte Laïque ….. »
Un peu plus tard, à la question portant sur les raisons de la négation de cette islamisation par les pays européens, Paul Landau résumera la situation de la sorte :
« La raison de cette négation … ce sont les gens qui en sont les acteurs, qui refusent de nommer les choses ; çà fait partie, je dirais, du phénomène de ce nouveau langage politiquement correct, quasiment totalitaire dans lequel on ne peut pas désigner les choses. Si vous parlez d’Eurabia, alors vous êtes un adepte de la théorie du complot. Si vous parlez d’islamisation, alors vous êtes un islamophobe ou un ennemi des musulmans, c’est-à-dire qu’aujourd’hui, il y a certains mots qu’on n’a plus le droit d’employer en France. »
Sur la première partie de cette interview radiophonique, j’avoue avoir une approche différente de celle de Paul Landau. En effet, je pars du principe qu’un être humain qui a échappé à un attentat terroriste puis a été ensuite capable de surmonter le choc produit par une scène d’horreur et la perte de collègues journalistes à Alger, est d’autant plus armé, une fois arrivé et installé en France, pour affronter certains des dictateurs autorisés de la pensée musulmane qui exercent des pressions intolérables à l’encontre de ceux qui affirmeraient leur anti-islamisme. Donc, moi, je ne crois pas du tout en l’argument du terrorisme intellectuel exercé par l’islam en France quand on a soi – même déjà affronté le terrorisme tout court dans son pays d’origine. En revanche, je pense que derrière le comportement d’un Mohamed Sifaoui, il y a aussi, indépendamment des questions liées à l’islam, des ambitions personnelles de carrière. On sait que certains êtres humains, aussi bien hommes que femmes (contrairement à ce que racontent certaines féministes qui tenteraient de nous persuader que les femmes auraient une propension en quelque sorte naturelle à "être moins carriéristes et/ou moins arrivistes"), ne peuvent pas résister à ce que j’appelle "la Jet set médiatique" qui vous propulse sous les feu de la lumière ô combien si trompeusement enivrante des projecteurs, font de vous un personnage public et vous donne le sentiment gratifiant "d’être quelqu’un", d’être reconnu pour ce que vous dites ou ce que vous paraissez être et donc l’impression d’exister réellement au travers de l’image que vous renvoyez. Ce n’est pourtant qu’un miroir, parfois un mirage dans une vie, et lorsque les projecteurs s’éteignent, le réveil peut s’avérer douloureux. La chute fracassante. Aussi, quand l’heure d’affronter la réalité des conséquences cruelles du fascisme islamique qui croît chaque jour en Europe et qui explique d’ailleurs, pas seulement mais en grande partie, la montée progressive des extrêmes-droites en Europe, à ce moment-là, il sera trop tard pour comprendre enfin que la lumière des projecteurs avait aveuglé ceux qui s’en étaient abreuvé sans compter pour duper l’opinion publique.
Maintenant, en ce qui concerne la seconde partie du raisonnement de Paul Landau sur les raisons de la négation de la montée des situations qui témoignent dans notre pays et en Europe de la progression de l’islamisation, je partage entièrement son point de vue.
Simplement et dans la mesure où vous me demandez, à juste titre, quels comptes tente-t-on de régler avec les questions nationales au regard de cette attitude de défiance envers l’Etat d’Israël, je vais me permettre de compléter ici l’opinion de Paul Landau.
J’y ai fait allusion dans la première partie du présent article : nous vivons à l’heure de la globalisation. Les flux de personnes, de capitaux, de marchandises, des moyens de communication s’opèrent à l’échelle mondiale. Et qu’on le veuille ou non, bien-sûr, nous raisonnons en termes de continents, d’Etats mais paradoxalement, la notion de "frontières" tend à perdre toute sa signification originelle. Par ailleurs, quand vous écoutez certaines personnalités, de France ou d’ailleurs dans le monde occidental, issues de ce que j’appelle "la gouvernance mondiale de la pensée autorisée", qu’il s’agisse du milieu politique, artistique, sportif, industriel, d’un grand nombre d’intellectuels, à les entendre, on se demande encore si chacun de nous n’aurait pas la faculté de se pourvoir de bottes de sept lieues pour voyager d’un continent à l’autre. En d’autres termes, ces gens vous diront toujours que la globalisation, "c’est vraiment génial, il n’existe plus de différences entre les peuples, tout le monde peut aller chez tout le monde, tout le monde peut aimer tout le monde, tout le monde peut manger ce que mange votre voisin à l’autre bout de monde ….". Bref, pour ne prendre que l’exemple de la France, la globalisation serait synonyme de bonheur absolu, dans le genre "tout baigne et vive la conversion à la gouvernance mondiale, quitte à ce que nous soyons des millions, des milliards d’individus dans cinquante ans à perdre notre âme, notre capacité à conserver la maîtrise de nos destins en tant que peuples ; allons-y néanmoins de bon cœur, n’hésitons pas à préparer le terrain de la disparition des fondements judéo-chrétiens et pour grande partie gréco–romains de notre civilisation, comme tant d’autres avant nous avaient à leur tour disparu."
Alors, vous allez me faire remarquer : quel est le lien avec Israël ?
C’est très simple : je pense qu’Israël est encore un des rares Etats-nation qui ose s’affirmer en tant que tel dans le concert des Nations et, de surcroît, le revendique. D’où, à mon avis, le malaise palpable que l’on ressent dans l’assemblée lorsqu’Israël intervient à la tribune du Conseil de sécurité de l’Organisation des Nations-Unies par exemple. De toute évidence, Israël reste et demeure un Etat qui dérange parce qu’il a la capacité, lui et donc son peuple, de renvoyer l’image aux "élites mondiales" - ou du moins supposées l’être – d’un pays qui défend encore des valeurs que la plupart des nations occidentales n’ont plus, depuis parfois déjà trop longtemps, la volonté de partager et surtout de défendre. Si vous prenez l’exemple du mot "patriotisme", c’est encore un mot qui a un sens en Israël. La différence avec Israël, c’est que si vous avez "le malheur" de prononcer le mot "patriotisme" en France, l’idéologie dominante des "élites gauchistes" qui sévissent par exemple au cœur de S.O.S Racisme vous insultent immédiatement et vous taxent de "fasciste", "pétainiste", "néonazi", "lepéniste". C’est juste oublier qu’un grand écrivain, en tout cas un de mes écrivains préférés, en l’occurrence Roman Kacew dit Romain Gary, a dit un jour : "Le patriotisme, c’est l’amour des siens ; le nationalisme, c’est la haine des autres." Et autant que je me souvienne de ce que me racontait mon arrière-grand-mère alors que j’étais encore enfant, Roman Kacew, jeune russe arrivé avec sa mère dans la France des années 1930 où s’amoncelaient déjà dans le ciel les nuages sombres annonciateurs des crimes que le nazisme allemand allait engendrer en Europe, le jeune Roman Kacew n’hésitera pas, tout juste naturalisé, à rejoindre la France libre en 1940 où il ira servir dans les Forces aériennes françaises libres. Donc, par définition, la phrase de Romain Gary, précitée plus haut, n’était pas du tout celle d’un "fasciste, pétainiste, néonazi" et autres noms d’oiseaux en tous genres que l’on pourrait entendre aujourd’hui. Mais au fond, cela aussi est symptomatique d’une époque : c’est le signe que la France est en perte complète de repères, ne se bat plus pour défendre ses valeurs. Pire : elle s’acharne à se suicider en laissant désormais croire à ses enfants que certains mots, tel celui de "patriotisme", seraient devenus des mots grossiers. Malheureusement, un pays qui perd la mémoire de sa culture, fut-elle littéraire, est un pays voué à disparaître. Et je suis convaincue que c’est en partie cela que le monde reproche à Israël, ouvertement ou pas, souvent sournoisement en préférant mettre en avant des prétextes fallacieux : Israël ne veut pas disparaître, ni en tant qu’Etat ni en tant que peuple. Et il a bien raison de se battre à cette fin !
Bonapartine.