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Un immense décalage. C'est du moins ce que reflètent les événements survenus au large de Gaza. Par décalage, il faut entendre la perception erronée de l'Occident crédule qui semble décidé à ne pas saisir les dangers d'une propagande djihadiste, celle qui résulte de l'inépuisable activité des idéologues islamistes radicaux.
Ce qui est arrivé à bord de la flottille est le fruit d'une islamisation croissante de la politique régionale et de l'échec des Israéliens à y porter une réponse adéquate. Le groupe turc IHH (Insani Yardim Vakfi) qui a parrainé le Mavi Marmara, est relié à la célèbre organisation des Frères musulmans. Dans les années 1990, cette association s'était engagée dans le Djihad mondial en facilitant l'envoi de jeunes recrues islamistes vers les points chauds de la lutte : en Afghanistan, en Tchétchénie et en Bosnie.
Comme d'autres associations rattachées aux Frères musulmans, l'IHH est ouvertement, et sans ambiguïté aucune, opposée à l'existence de l'Etat d'Israël et n'attend qu'une chose : assister à sa destruction, rigoureusement planifiée par les organisations islamistes. L'IHH cherche à combiner un engagement superficiel pour les "droits de l'Homme" sur fond de victimisation, avec le soutien des militants islamistes contre l'Occident. Comme on a pu le constater cette semaine.
Une précision toutefois, à bord de ce navire : deux groupes distincts. D'un côté, une majorité de jeunes participants occidentaux issus des rangs de la gauche et de l'extrême-gauche. De l'autre, un noyau dur d'Islamistes turcs qui a ouvertement proclamé son engagement pour le Djihad et contre Israël. Le groupe n'en est pas à son premier coup d'éclat : il avait été impliqué dans des altercations avec les forces de l'ordre égyptiennes au sud de la frontière avec Gaza, où un policier égyptien avait été assassiné. Et entre les deux camps, la compréhension a connu quelques écueils. Parmi les passagers occidentaux à bord du navire - très naïfs, pour beaucoup - certains se sont déclarés effrayés de trouver de tels compagnons de la flottille.
Mais un mystère demeure : pourquoi les renseignements israéliens n'avaient pas eu vent de la présence de tels activistes dans cette opération. Ces Islamistes turcs étaient venus lutter pour des valeurs parfaitement claires. Leur préparation était peut-être plus incertaine, mais leurs paroles et leurs actions étaient, elles, très bien définies.
Une aide en trompe-l'œil
Au premier coup d'oeil, on pourrait penser qu'une mauvaise estimation de la situation a mené à une réponse inadéquate. Qui a elle-même donné naissance aux faits que l'on connaît et que le monde entier décrie. A la mode - désormais célèbre et habituelle - israélienne, une mauvaise préparation a été rattrapée par la performance et l'efficacité des commandos.
Mais espérons que de telles échauffourées éveilleront les consciences du ministère de la Défense. Derrière ces accrochages, les forces en présence révèlent un conflit bien plus profond et inquiétant : entre les ambitions des Etats islamistes tels que l'Iran, et les énergies provenant des mouvements et des organisations internationales, l'enclave du Hamas à Gaza est un satellite éloigné du régime des Mollahs. Les militants de l'IHH entendaient ouvrir la voie des mers à Gaza. Leur but n'était pas humanitaire. Pour preuve : le Hamas avait refusé l'entrée dans la bande de Gaza de l'aide contenue dans ce convoi. Non, clairement, cette "aide" était stratégique. Les activistes du Mavi Marmara espéraient mettre un terme à l'isolation de Gaza.
Leur objectif non dissimulé : permettre à la bande côtière délabrée de retrouver des couleurs pour devenir un camp armé dont les fusils pourraient bientôt pointer l'Etat juif. Ils ne sont pas parvenus à cela. Mais ont en revanche réussi à isoler diplomatiquement Israël. La plupart des pays occidentaux tendent à refuser d'intégrer cette réalité. Au lieu d'une avalanche médiatique qui aurait dépeint les inquiétudes justifiées de l'Etat d'Israël, les militants islamistes ont été décrits comme des humanitaires, combattant pour la paix et tous ont déclaré que des sanctions contre Israël seraient la meilleure façon de résoudre le problème.
Ironie de l'histoire : le manque de conscience du monde occidental se reflète dans l'échec des stratèges israéliens à différencier les militants islamistes des passagers occidentaux. Mais quoi qu'il en soit, la réponse occidentale à cet événement prouve le décalage entre la réalité et la perception des "préoccupations de la région". Et c'est là, l'une des plus grandes réussites du côté islamiste.
Monde réel vs. confusion ambiante
De retour au monde réel, en attendant, l'Iran, principal bénéficiaire de cette confusion ambiante, a annoncé cette semaine être déterminé à enrichir son uranium à 20 % et au delà. L'officiel iranien Ali Asghar Soltanieh a complètement exclu la possibilité de voir des sanctions onusiennes empêcher Téhéran de continuer sa course au nucléaire. Une information qui n'a bien évidemment pas été relayée en masse par les médias : à peine quelques petits encarts dans les quotidiens les plus réputés, parfois juste avant le passage d'un cyclone à Oman.
Car la principale information de la semaine n'était autre que l'opposition de Binyamin Netanyahou à toute enquête internationale sur les événements du Mavi Marmara. L'agenda des rédactions convient donc parfaitement aux priorités de la République islamique iranienne et de ses alliés. En coulisses, tout se passe pour le mieux et en silence. Alors qu'au-devant de la scène, les yeux du monde sont tournés vers le spectacle bien trop bruyant au large de Gaza.
L'auteur est chercheur au Centre international IDC à Herzliya.