H. Nasrallah cherche à fuir son poste.
Fiasco à Bangkok, trafics mis à jour à travers le globe, escroqueries financières internes, espions au cœur de l’appareil…
Par Marc Brzustowski
Un militant chi’ite indépendant, Lockman Slim, se fondant sur le compte-rendu de sources bien informées, a récemment confié qu'Hassan Nasrallah, - Secrétaire-Général du Hezbollah- s’est plaint, lors d’une rencontre au sommet, il y a deux semaines, du fait qu’il ne voulait plus occuper son poste.
Depuis, le navire Hezbollah prend l’eau, avec la capture d’Hussein Atris à Bangkok et la chasse à l’homme qui s’en en suivie contre un homme ressemblant presque trait pour trait, d’après son portrait-robot, à la photo diffusée par le Shin Bet, l’an dernier : il pourrait s'agir du troisième homme du bras armé formé afin de mener la vengeance pour la mort de Mughniyeh, Naïm Haris. Au-delà de la tentative avortée d’attentats contre des intérêts israéliens, c’est toute une filière d’écoles et d’organismes de « charité » à l’intention de la population musulmane du pays, qui devait servir de foyer de recrutement de futurs agents.
Peu de temps auparavant, le Département du Trésor américain mettait à jour un réseau international de blanchiment de l’argent de la drogue, récolté par le parti de D.ieu, Qui, comme chaque croyant ne s’en doutait pas encore, serait, selon la version du Hezb, un grand fumeur d’opium et consommateur de cocaïne, revendeur de voitures volées en Afrique… Pas moins de 9 inculpés, 19 sociétés-écran, resserrant le filet autour de la Banque Libano-Canadienne et des circuits financiers complexes mêlant drogue et concessions de voitures d'occasion, en Amérique latine et en Afrique...
Grâce au “Bernie Madoff Libanais”, les dirigeants du Hezbollah ont de plus en plus de mal à éviter ou démentir la question de la corruption, telle qu'elle s’est déroulée au sein même du Parti. En 2009, Salah Ezzedine, un homme d’affaire libanais ayant les relations les plus étroites avec le groupe chi’ite, a fait s’écrouler une carambouille suivant un schéma en pyramide, qui lui permettait d’escroquer de très nombreux partisans de la milice. D’abord pressé de désavouer Ezzedine, le Hezbollah a dû reconnaître sa part de responsabilité et instaurer un centre d’aide aux partisans affligés par l’affaire….
De récents reportages évaluent la fortune du Secrétaire-Général à plus de 250 millions de $, l’ensemble des cercles dirigeants disposant de plus de 2 milliards de $. C’est si peu pour combattre au nom de la « Justice » !
Les partisans du Hezbollah ont aussi été particulièrement scandalisés par les reportages montrant le fils d’Imad Moughniyeh, le cerveau terroriste tant vénéré, dilapider aujourd’hui sa fortune accumulée dans les rues de Beyrouth.
A l’extérieur comme à l’intérieur, le Hezbollah se confond, de plus en plus, avec une grande famille de requins-mafieux. Bien plus, en tout cas, qu’avec un grand parti « libanais » d’islamistes vertueux combattant, au Sud-Liban, les quelques débits de boisson qui se risquent à ouvrir.
Il est de plus en plus improbable que son patron à Damas puisse survivre. Et des observateurs libanais ne parient pas, non plus, sur la survie du régime théocratique d’Iran, entraîné dans la tourmente des sanctions, devant réduire son financement de la milice chi’ite et la conduisant, peu ou prou, à des opérations désespérées, du style de celle en Asie du Sud-Est. Elles visent simplement à redorer son blason, à l’international. Face à une monnaie dévaluée, à une guerre secrète qui frappe durement le sommet de son intelligentsia nucléaire, Téhéran en serait réduit à proférer des menaces de fermeture du Détroit d’Hormuz, qui pourraient accélérer la chute de ce régime. Le Hezbollah s'dapte et bricole, comme il peut.
Si les partenaires régionaux du Hezbollah sont pris dans le tourbillon, l’arène intérieure libanaise présente des défis encore plus intimidants pour le Hezbollah. Le contrôle qu’il exerçait sur le Sud-Liban semble de plus en plus improbable. Les crimes et les troubles sociaux se multiplient, sans que la milice ne puisse en venir à bout. Si bien qu’elle en est, de plus en plus, réduite à faire appel à l’Etat libanais pour imposer un minimum de règles à cette entité non-étique qui, jusqu’à il y a peu, était considérée comme son fief. Mais c’est qu’il est bien l’origine de ces désordres :
"Après la guerre du Liban II, les Iraniens ont déversé des flots d’argent sur cette région, et tout un chacun s’est accoutumé à un certain style de vie. Le Parti continuait de flatter les Chi’ites en leur disant qu’ils étaient les meilleurs et les plus vertueux des hommes. Aussi même les voleurs de voitures et les trafiquants de drogue pouvaient se considérer comme des modèles de vertu. Aujourd’hui, ils sont incapables de les contrôler », témoigne Lockman Slim.
Il est probable que l’annonce que le Saint des Saints du parti ait été infiltré par des services étrangers, a été le signe le plus significatif de la fragmentation du « parti de la résistance ». S’embourgeoisant, les plus hauts dignitaires, les commandants de ce groupe, les inspecteurs miliciens devenaient corruptibles. Le Parti ne sait pas comment apporter un correctif à la rumeur qui enfle. S’ils sont tentés de se vanter d’avoir découvert une vaste opération d’intoxication de l’intérieur, ils admettent, tout simplement, que les services américains et israéliens ont été capables de s’insinuer au sein d’une organisation dont tout le prestige reposait sur une discipline inflexible, une sécurité fondée sur les seules relations claniques de personne à personne, entre cousins fiables, la vaillance jusqu’à la mort de ses hommes de rang et, a fortiori, de leurs chefs. Pire que tout, le Hezbollah paranoïaque sent que la pression s'exerce sur la structure religieuse de son organisation et en est arrivée à condamner à mort un de ses anciens hauts dignitaires religieux.
En octobre dernier, un Tribunal libanais dirigé par un Juge aux ordres du Hezbollah a condamné Hassan Mchaymech pour collaboration avec Israël. Selon son fils Reda, le message ne s’adresse pas au seul dignitaire chi’ite. Quiconque dévie du rayon d’influence du Hezbollah est considéré comme ennemi mortel du Hezbollah et, donc, un collaborateur d’Israël. Son fils ne l’avait pas revu depuis 9 mois. Ce n’était plus le même homme, amaigri, vidé, semblant être drogué, incohérent. Les hommes du Hezbollah ont diffusé un CD de ses supposées « confessions » : elles sont, en fait, parfaitement inaudibles. Sa voix apparaît masquée comme à travers un chiffon.
Il y a vingt ans, Hassan Mchaymech était une figure centrale des cercles dirigeants du Hezbollah. Du temps du Premier secrétaire-général, Sobhi Tufayli, Mchemech était chargé de l’organisation des religieux au sein du parti. Avec le départ de son mentor, en 1992, puis l’assassinat d’Abbas Moussawi par Israël, et son remplacement par Nasrallah, le temps de l’ancien responsable était compté. Selon le père du jeune homme, Nasrallah est un pur produit de l’Iran. Si Tufayli pouvait prendre des positions différentes de l’appareil sécuritaire du Hezb, Nasrallah en est totalement incapable. D’où sa dépendance à l’égard d’Imad Moughniyeh et l’équilibre que le parti tout entier a perdu, lors de l’élimination de celui-ci. D’où, l’impératif de le venger n’est plus une simple question de prestige aux yeux de la rue arabe, mais devient un impératif de survie politique, par démonstration de son habileté à imposer la terreur et à rendre coup pour coup. D'autant que l’Iran, en difficulté, a surinvesti dans ce groupe et dans ses actions sur les cinq continents (à commencer par l’Amérique du Sud : attentats de Buenos-Aires en 1992 et 1994, jusqu’aux trafics de drogue, depuis les Trois-frontières d’Iguaçu, jusqu’à Tijuana au Mexique.).
En 1998, Nasrallah et Tufayli, alors free-lance, se sont opposés frontalement, et Hassan Mchaymech a, bien évidemment, pris parti pour son mentor en qui il avait toute confiance. Le parti a accusé ce dernier de ne plus croire dans la doctrine fondamentale du Wilayet e-Faquih, soit, en la guidance morale, spirituelle et politique du Guide Suprême, Ali Khamenei. Le dignitaire déchu s’est, simplement, rendu compte que cette doctrine prévalait sur toute décision, y compris liée à la vie courante libanaise. Il avait conservé une certaine admiration pour les valeurs occidentales, entraperçues dans leurs bienfaits, lors de ses voyages en Suisse, Allemagne et France. A tel point qu’il a fini par penser que sa société était profondément rétrograde et qu’il avait pour mission spirituelle de prendre cette situation à bras-le-corps. Dissidence qui ne pardonne pas. Un mois avant son arrestation, il publie un article expliquant son divorce avec la conception étriquée qui gouverne le Hezbollah et l’ensemble de la communauté chi’ite du Liban : « un mandat sans termes clairs est une recette favorisant la corruption, même si les personnes sélectionnées ont les plus hautes vertus morales, à moins qu’elles ne soient Prophètes ou l’incarnation de l’Imam –caché ». Une telle sentance ne peut tomber dans l'oreille d'un sourd. Elle annonce, à plus ou moins long terme, la déliquescence du Hezb., telle qu'on la pressent un peu plus, chaque jour que D.ieu fait.
Contacté par un Autrichien converti au Chi’isme pour ouvrir une école de pensée « ouverte », celui-ci lui présente ensuite un homme appelé Abu Ali. Rapidement, ce dernier s’identifie comme membre des services anti-terroristes allemands, très inquiet d’obtenir des confidences d’Hassan Mchaymech, au sujet d’Imad Moughniyeh et Mustafa Badreddine, plus tard impliqué dans le meurtre de Rafik Hariri. Mais le dignitaire évacue les questions, se déclarant totalement incompétent en matière sécuritaire et seulement focalisé sur les questions religieuses. L’officier allemand lui fait alors comprendre qu’il n’a plus rien à faire en Allemagne, malgré l’interdiction du Hezbollah qu’il remette les pieds au Liban. Celle-ci s'étant "assoupli", il n'a pas d'autre choix que rentrer...
Inquiet des répercussions que de tels échanges pourraient avoir, s’ils s’apprenaient, au sein de l’organisation, Mchaymech contacte un ami des services extérieurs, Ali Damoush pour debriefing. L’affaire semblait en rester là entre 2005 et 2010, jusqu’à son arrestation lors du passage de la frontière syrienne, voulant se rendre à La Mecque. Il est enlevé par les services secrets syriens. Ce n’est que deux mois après que sa famille obtient enfin la moindre première nouvelle, dans un journal du Hezbollah, Al- Akhbar. Le Hezbollah s’en lave les mains et dit ne rien savoir des accusations syriennes contre lui. Il s'est contenté de le livrer. Il reste en prison du côté syrien.
C’est ainsi que Lockman Slim a travaillé aux côtés de la famille de cet homme pour tenter de lui éviter la peine de mort, d'abord en Syrie, puis au Liban. A travers son cas, c’est toute la communauté chi’ite libanaise qui paie un très lourd tribut à la dérive iranienne de Nasrallah. Le message que celui-ci adresse aux Libanais et, particulièrement, aux Chi’ites c’est, qu’individuellement, ils ne sont pas indispensables et peuvent disparaître du jour au lendemain…
Ainsi en ira t-il aussi d'Hassan Nasrallah, vers une destination inconnue des îles Caïman, le jour où le Liban commencera à vouloir sérieusement lui demander des comptes pour sa "Justice" aussi expéditive que sélective?
(A partir d’articles de Lee Smith, rédacteur au Weekly Standard www.weeklystandard.com, Jonathan Schanzer, vice-Président de la Fondation pour la Défense des Démocraties et des premiers éléments d'enquête en Thaïlande)