LA RECONNAISSANCE DE L’ETAT PALESTINIEN EN DROIT INTERNATIONAL
Par Maître Bertrand Ramas-Muhlbach
Pour © 2010 lessakele et © 2010 aschkel.info
En ce mois de décembre 2010, le Président palestinien Mahmoud Abbas a incité la communauté internationale à reconnaître « l’Etat de Palestine » et, comme s’il s’agissait d’une évidence, « dans les territoires occupés depuis 1967 ». Mahmoud Abbas souhaiterait, en effet, intégrer dans son futur Etat, la partie orientale de Jérusalem (et notamment le Mont du Temple sur lequel est implantée la mosquée Al Aqsa), annexée par l’Etat hébreu en 1967, et sur laquelle le Roi Hussein de Jordanie a définitivement renoncé à toute souveraineté en juillet 1988. Ce faisant, le Président palestinien cultive habilement une forme d’association d’idées selon laquelle l’Etat de Palestine doit nécessairement s’accompagner d’une partition de la capitale éternelle du Peuple juif.
Le procédé a conduit à l’obtention de résultats non négligeables : neuf pays d’Amérique du Sud ont décidé de reconnaître l’Etat de Palestine dans « un Etat libre et indépendant à l'intérieur des frontières de 1967 », dont le Brésil et l’Argentine (respectivement le 3 décembre et le 6 décembre). Le 25 décembre 2010, c’est l’Equateur qui a franchi le cap en attendant que l’Uruguay y procède en 2011. Inversement, les Etats-Unis ont exprimé leurs réserves même si le Président Obama a fait part de son souhait (le 24 septembre 2010) de voir créer l’Etat palestinien dans un délai d'un an. De même, les ministres des Affaires étrangères européens réunis à Bruxelles ont refusé de se prononcer sur la question le 14 décembre 2010, réaffirmant être prêts à le faire lorsque « ce serait approprié ».
La question peut donc se poser de savoir pourquoi la communauté internationale tarde autant à reconnaître cet Etat de Palestine alors que le discours internationalement répandu est celui d’une urgence dans la création de cet Etat. En réalité, et même si les récalcitrants à une telle reconnaissance n’osent véritablement l’avouer, il semblerait que le retard pris tienne essentiellement, à des considérations de Droit international. En effet, le principe de la reconnaissance internationale de l’Etat de Palestine exige qu’elle s’inscrive dans les principes fondateurs du Droit international et plus précisément la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme du 10 décembre 1948, mais aussi le Pacte international relatif aux droits civils et politiques adopté le 16 décembre 1966 (et entré en vigueur le 23 mars 1976).
S’agissant tout d’abord des Droits de l’Homme, la Déclaration Universelle de 1948 reprend une liste de considérations à l’origine de son adoption. Il est ainsi posé que ce sont la « méconnaissance et le mépris des Droits de l’Homme » qui sont à l’origine des actes de barbarie qui « révoltent la conscience de l’humanité » alors que la plus haute aspiration de l’homme est « l’avènement d’un monde libéré de la terreur et de la misère ». Par ailleurs, il est rappelé que la liberté, la justice et la paix dans le monde, se fondent sur la reconnaissance de la dignité inhérente à tous les membres de la famille humaine et de leurs droits égaux et inaliénables. Enfin, les Etats signataires se sont engagés à garder ces principes à l’esprit, et à s’efforcer par l’enseignement et l’éducation à développer le respect de ces droits et libertés. C’est ainsi que le premier article de cette déclaration rappelle : « Tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits. Ils sont doués de raison et de conscience et doivent agir les uns envers les autres dans un esprit de fraternité »… Si donc l’Etat palestinien est créé, ses membres devront être animés de ces dispositions d’esprit, ce qui n’est, hélas, pas le cas. Le Hamas a une nouvelle fois appelé à l’éradication de l’entité sioniste, ce 25 décembre 2010, et ce, par tous les moyens, alors que Mahmoud Abbas admettait (le même jour), l’impossibilité de se débarrasser du Mouvement islamiste. Dans ces circonstances, une reconnaissance de la Palestine reviendrait, pour la communauté internationale, à violer ses propres principes et sa conception des Droits de l’Homme.
De la même manière, pour ce qu’il en est du Droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, le Pacte international du 16 décembre 1966 rappelle une fois encore qu’il se fonde sur la reconnaissance de la dignité inhérente à tous les membres de la famille humaine, de leurs droits égaux et inaliénables pour fonder liberté, justice et paix dans le monde. Aussi, marque-t-il l’accent sur les devoirs de l’individu envers autrui et envers la collectivité à laquelle il appartient, tout comme la promotion du respect des droits listés dans le pacte. En effet, les peuples ne peuvent librement déterminer leur statut politique et assurer leur développement économique social et culturel, que dans ce cadre. Bien évidemment, lorsque le commandant Muhammad Deif, commandant du Hamas déclare à l’occasion du 23ème anniversaire du Mouvement (le 25 décembre 2010), que son peuple continuera de se battre jusqu’à la disparition totale d’Israël (ce qui est d’ailleurs l’objet de sa création), il place une nouvelle fois la communauté internationale dans une position inconfortable au regard de la reconnaissance de cet Etat palestinien.
Enfin, la reconnaissance de l’Etat palestinien ne doit pas entrer en contradiction avec le principe du droit à la vie mentionné sous l’article 3 de la DUDH et sous l’article 6 du pacte international aux droits civils et politiques qui l’énoncent de la manière suivante : « Le droit à la vie est inhérent à la personne humaine. Ce droit doit être protégé par la loi. Nul ne peut être arbitrairement privé de la vie ». Or, comme la philosophie palestinienne développée dans les Chartes de l’Olp et du Hamas n’est pas tout à fait respectueuse du droit à la vie des personnes juives, la reconnaissance de l‘Etat palestinien reviendrait à cautionner le principe palestinien de l‘élimination du juif. En réalité, et sur ce point, non seulement il n’est pas possible de favoriser la création de l’Etat palestinien mais, en outre, et conformément aux dispositions de l’article 4 de la deuxième partie du pacte de 1966 (consacrée aux prérogatives individuelles des individus résidant dans un Etat), il est urgent de ne pas le faire. Cet article stipule en effet que « Dans le cas où un danger public exceptionnel menace l'existence de la nation et est proclamé par un acte officiel, les Etats parties au présent Pacte peuvent prendre, dans la stricte mesure où la situation l'exige, des mesures dérogeant aux obligations prévues dans le présent Pacte, sous réserve que ces mesures ne soient pas incompatibles avec les autres obligations que leur impose le droit international et qu'elles n'entraînent pas une discrimination fondée uniquement sur la race, la couleur, le sexe, la langue, la religion ou l'origine sociale ». Une fois encore, le contexte n’apparait pas tout à fait propice à la création de l’Etat palestinien.
Lorsque ces premiers obstacles auront été levés, la création de l’Etat palestinien supposera de vérifier les modalités d’application du principe consistant dans le Droit des peuples à disposer d’eux-mêmes (article 1er Charte 1966). Le peuple (bien que non défini) est entendu comme une unité humaine qui partage le même rêve d’avenir, sur un territoire spécifique où il peut disposer des richesses naturelles, et dont l’Etat incarne la personnification juridique. Pour autant, et avec la mondialisation, le concept de peuple a évolué puisqu’il est également compris comme l’ensemble des individus résidant à l’intérieur des frontières d’un pays internationalement reconnu. Il est pour l’heure des villages en Cisjordanie peuplés de Juifs dont il est important de connaître le sort dans le futur Etat palestinien. Hélas, ce 25 décembre, Mahmoud Abbas a bien confirmé le caractère raciste de son futur Etat : « il n’y aura pas d’israéliens dans le futur Etat palestinien ».
Enfin, et surtout, cet Etat palestinien devra respecter le principe d’une impossibilité de porter atteinte à la souveraineté d’autrui. Les Juifs constituent également un peuple titulaire du Droit de disposer de lui même. C’est donc de façon logique que le Premier Ministre Benjamin Netanyahou exige du Président de l’Autorité palestinienne qu’il reconnaisse l’Etat d’Israël comme étant l’Etat juif, exigence qui est pourtant refusée par les Palestiniens. De même, et pour ce qu’il en est de l’assiette territoriale de l’Etat palestinien, elle ne devra pas s’exercer sur des terres sous souveraineté juive, et notamment Jérusalem. Les palestiniens ont refusé la résolution du 29 novembre 1947 sur le partage de la Palestine en un Etat juif et un Etat arabe qui était nettement plus avantageux pour eux. Par ailleurs, la configuration géopolitique actuelle n’est que le résultat des guerres déclarées par les Etats arabes et perdues par eux. Si donc les Palestiniens estiment que l’assiette de leur futur territoire ne leur convient pas, c’est aux pays arabes de la région qu’il conviendra de solliciter un dédommagement pour les avoir emmenés sur un chemin stérile depuis 62 ans. En tout état de cause, c’est au Droit international qu’ils devront se soumettre.
SABBAH 28/12/2010 19:01
Jmn 28/12/2010 15:15
SABBAH 27/12/2010 17:54
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SABBAH 26/12/2010 22:58