Le soulèvement au Moyen-Orient met en lumière la signification marginale du conflit israélo-palestinien.
- PS : nos remettons d'actualité ce texte du 02 février 2011, soit il y a plus d'un an, au moment des évènements du "Square Tahrir" : il est avant-coureur et éclairant de ce qui se joue, actuellement, dans le Sud d'Israël : les missiles fusent de toutes part, car l'Iran et la Syrie ont besoin d'une couverture, l'un pour avancer son programme nucléaire en se jouant des six puissances négociatrices, l'autre, pour masquer ses massacres. Le "bouton rouge" qui leur permet d'actionner le Jihad Islamique, démontre à quel point la "cause palestinienne" ne se réveille bien que lorsque les pires dictatures de la région sont aux abois : le combat pour l"'image" et la déconstruction d'un narratif cousu main est essentiel à faire triompher la légitimité d'Israël, ilôt de stabilité dans un Moyen-Orient agité... C'est aussi pourquoi la candidature de Philippe Karsenty, dans la 8ème circonscription fait l'objet de tels enjeux - Gad.
Manfred Gerstenfeld
Adapté par : Marc Brzustowski
Pour © 2011 lessakele
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Dans la foulée des émeutes égyptiennes déterminantes, des troubles dans d’autres pays arabes et des conséquences incertaines de tout ceci, un autre champ de bataille sera, très bientôt, modifié du tout au tout : celui du débat public sur le Moyen-Orient et de la place qu’y tient vraiment le conflit palestino-israélien.
L’instabilité dans le monde arabe croît de façon exponentielle et les dirigeants occidentaux sont en pleine confusion concernant ce qu’ils devraient faire. En une telle situation, certains d’entre eux font comme de répéter, et même avec plus de force encore, les quelques rares choses qu’ils peuvent dire, alors que personne ne peut prouver qu’elles soient entièrement erronées. Les autorités israéliennes se doivent de suivre avec attention les signes avant-coureurs de ce type. Un signal de ce genre était contenu dans la déclaration faite par la chancelière Angela Merkel au cours de sa visite ici (en Israël). Elle a, en effet, fait appel à Israël pour qu’il fasse des pas constructifs en vue de ranimer le processus de paix au Moyen-Orient.
Un autre signal que ce phénomène nous attend au tournant, de façon bien plus accentuée de la part de nos ennemis, est contenu dans un article du Asian Times, rédigé par un ancien ambassadeur indien, M.K Bhadrakumar. C’est un spécialiste du blanchiment en série des politiques hideuses d’Erdogan et des dirigeants iraniens. Bhadrakumar prétend qu’Israël « s’est efforcé de détourner l’attention américaine du programme contenu dans le processus de paix au Moyen-Orient et de l’entraîner vers le programme nucléaire iranien. Ce stratagème a très bien marché jusqu’à présent, mais la crise moyen-orientale ramène le problème palestinien dans le vortex des politiques régionales ».
Avec ce qui se déroule actuellement en Egypte, Israël peut encore moins se permettre de prendre des risques pour une improbable « paix » avec les Palestiniens. Il y a deux messages-clés et clairs sur lesquels Israël doit insister dans le cadre de sa diplomatie publique. Le premier est que les bouleversements majeurs en Egypte démontrent à quel point les traités de paix avec les pays arabes ne sont pas garantis, tant qu’ils sont conclus avec des dirigeants non-démocrates. De cela découle que les préoccupations sécuritaires n’en deviennent que plus cruciales pour Israël.
En des temps de grande incertitude dans la région, un gouvernement responsable ne doit pas aggraver les choses en adoptant des accords avec un partenaire palestinien qui peut être renversé dans un avenir proche. Les dirigeants de l’Autorité Palestinienne démentent actuellement qu’ils étaient prêts à faire des concessions telles que diffusées par Palileaks. Cela démontre, une fois de plus, que la nature des accords passés avec des dirigeants dont le statut est douteux est radicalement différent d’accords signés avec une démocratie.
Le second message clair à véhiculer est que le conflit palestino-israélien n’est pas du tout au cœur de l’instabilité dans le monde arabo-musulman. Pousser à tout prix pour l’établissement rapide d’une « paix » ne contribuera pas à stabiliser ces pays. Plutôt que ce soit le conflit palestino-israélien qui influence la région de façon essentielle, c’est lui qui est grandement influencé (et dépendant) de ce qui se passe dans la région.
C’était déjà évident depuis longtemps pour quiconque voulait vraiment regarder les choses en face. C’était même devenu encore plus clair, du fait des évènements récents. Peut-on affirmer que pas une seule personne ne se serait immolée durant les dernières semaines s’il y avait la paix entre Palestiniens et Israéliens ? Pas un seul Tunisien, Egyptien ne serait demeuré dans ses foyers, au cours des récentes manifestations de masse, pour autant qu’ait régné une telle paix.
De façon similaire, on peut formuler des déclarations fortes en ce sens qui resteront valables à l’avenir. Les meurtres réciproques entre chi’ites et sunnites et les tensions entre ces deux courants de l’Islam ne vont pas s’évanouir par enchantement. La fuite en avant et le meurtre occasionnel des Chrétiens des contrées arabo-musulmanes ne s’arrêteront pas d’eux-mêmes. Savoir si l’ordre public au Pakistan s’effondrera ou non est totalement indépendant du conflit palestino-israélien. Que l’Iran décide s’il poursuit sa course pour achever sa bombe atomique et l’entendre comme une variable du statut global du conflit palestino-israélien est une fiction sortie de l’imagination de déments.
La plupart de ces arguments n’ont rien de nouveau. Par le passé, cependant, les problèmes spécifiques incluant des attentats-suicide dans la région attiraient seulement une attention limitée pour une courte période, alors qu’il y a tant d’autres problèmes dont se préoccuper dans le monde. Ce qui est nouveau, c’est que, désormais, il y aura une focalisation internationale permanente durant un laps de temps substantiel à venir sur cette région. C’est ce qui rend également possible d’insister sur les arguments d’Israël d’une façon continuelle.
La question qui suit est, dès lors : que feraient en ce cas, les amis d’Israël dans leurs pays respectifs ? Ce serait une erreur de gaspiller ses forces sur un large front. Ce serait probablement bien plus efficace de rendre public le jugement erroné de quelques pontifes dans chaque pays occidental, qui n’ont pas réussi à comprendre la région et se sont focalisés par le petit bout de la lorgnette sur le problème palestino-israélien. Les discréditer pourrait les conduire à y réfléchir à deux fois.
Dr. Manfred Gerstenfeld a publié 19 ouvrages, dont plusieurs d’entre eux concernent les relations internationales d’Israël.