éclairé par la voix tonique d'Aschkel
Craquements en cascade dans “l’Arc chi’ite”?
Grand Bazar et rebellions en Iran, Hezbollah « cerné » par le Tribunal international…
Par Marc Brzustowski
Pour © 2010 lessakele et © 2010 aschkel.info
L’Union européenne a décidé de lancer un quatrième train de sanctions contre l’Iran, dans les semaines qui vont suivre ce lundi 26 juillet. Elles concernent : tout matériau à double-emploi, civil et nucléaire, l’interdiction de tout nouvel investissement financier. Elles touchent la navigation et le transport aérien, les contrats d’assurance des entreprises et le gel des avoirs et visas des Gardiens de la Révolution.
De premières évaluations sérieuses des dommages causés sur l’économie iranienne par l’ensemble des mesures prises n’interviendront que plus tard. Mais, le Régime semble, d’ores et déjà, entraîné dans un maelström qui touche le cœur même de ses symboles. Plutôt que d’effet économique des sanctions, il s’agit de parler de conjonction de plusieurs facteurs, qui conduisent l’état mollachique à se raidir, sans toujours pouvoir rendre les coups :
En effet, depuis Zahedan au Baloutchistan, en passant par la grève des commerçants du Baazar, suivie à Téhéran, Ispahan, Tabriz et jusqu’en Azerbaïdjan iranien, rien ne va plus ! A cela s’ajoute le ralentissement de l’activité sur les sites gaziers de Pars-Sud, principale richesse énergétique du pays, considérée comme l’image de l’autosuffisance économique de l’Iran en état de siège
Depuis l’attentat de Zahedan au Baloutchistan, les Pasdaran ont tenté de reprendre le contrôle de la région rebelle. Il s’exerce, principalement, le jour, tandis que la nuit, des groupes hostiles au Régime, souvent, en armes, refont surface. Cela ne traduit qu’une chose : les Baloutches n’ont plus peur de Téhéran. Les nervis des Mollahs peuvent bien les arrêter, les torturer, l’ensemble de la population locale demeure incontrôlable. La réussite de ce coup d’éclat en plein jour-anniversaire de la fondation des Pasdaran rend le Jundallah d’autant plus dangereux qu’il reste localement très populaire. Agissant ce jour-là, les terroristes sunnites ont démontré que le régime n’avait ni autorité ni légitimité.
Malgré les mesures de quadrillage de la population, sur l’ensemble du territoire, l’onde de choc remonte jusqu’aux instances de gouvernement. 3 membres du Parlement ont présenté leur démission, en critiquant l’incapacité du pouvoir en place à assurer la sécurité. Plus, ils ont sous-entendu que les Baloutches subissaient un traitement abominable et qu’il ne fallait pas s’étonner que les Pasdaran deviennent une cible. Ces démissions ont été refusées, les Mollahs s’abstenant de débattre du problème des « minorités ». Or, peuvent-ils ignorer qu’elles représentent presque 50% de la population ? La situation baloutche est donc potentiellement explosive, puisque hautement contagieuse.
Le « mouvement vert » de Mousawi et Karoubi ne peut que monter dans le train en marche, cherchant à renforcer ses liens avec les minorités. Il charge donc les épaules du gouvernement Ahmadinedjad, déjà sous le feu de la critique, sur le plan social et économique. Il fustige l’inégalité de traitement et la discrimination que n’auraient plus qu’à attiser les groupes terroristes. Jusqu’à il y a peu, il est notoire qu’il existait un consensus fustigeant les autonomistes de tout poil, au nom de l’intégrité de l’héritage perse et chi'ite.
Mais, selon Michaël Ledeen, l’élément nouveau, c’est la mise en cause, de plus en plus ouverte, par des membres de l’élite, du Guide Suprême Ali Khamenei. On lui reproche, ainsi, de violer la Constitution. Un opposant en exil, Mohsen Kadivar a réclamé la destitution de Khamenei à Hashemi Rasfandjani, présidant l’Assemblée des Experts. Une sommité religieuse, Ahmad Gabel l’a accusé de mettre la Sécurité de la République iranienne en danger. Un journaliste courageux, Isa Saharkhiz, a produit devant la cour les preuves qu’il avait été torturé et, par la même occasion, réclamé que le Guide soit destitué. A tout cela, Khamenei n’a pu répondre que par la promulgation d’une Fatwa, le considérant comme mandaté par le Prophète, toute désobéissance devenant un parjure de l’Islam. D’autres mesures de rétorsion visent les programmes scolaires, censurant tout ce qui a trait à la Perse préislamique, ou l’interdiction de toute attitude à caractère sexuel durant la journée. Ce qui fait dire à Margaret Wente, dans le Globe and Mail, « qu’être une femme est devenu un crime » en Iran.
L’impact de ces restrictions des libertés est, pour ainsi dire, nul sur le comportement des Iraniens. Un officiel de l’agence de presse FARS, Haeri Shirazi, déplore que les progammes de la télévision d’état ne recueillent aucun spectateur.
Hormis la grève des commerçants dont on a parlé, l’exploitation des gisements gaziers de Pars-Sud, symbole du développement d’un pays assiégé, rencontre un ralentissement inquiétant. Shell, Total, Halliburton se sont retirés. Récemment, le responsable de l’ingénierie de la construction des Gardiens de la Révolution, Khatam al-Ambia a dû stopper deux projets-clés de raffinage du gaz. « Continuer l’activité mettrait les ressources nationales en danger », a-t-il déclaré. Sinotec, consortium chinois, et le Malaysien SRS Venture ont bien commencé certains travaux, mais l’essentiel est désormais réalisé par des entreprises locales peu connues, appartenant aux Pasdaran. En 2008, comparativement, le Qatar a exporté pour 62 milliards de $ de gaz, alors que l’Iran, disposant des meilleurs gisements mondiaux, n’a pu en vendre que pour 6 milliards de $ à l’étranger. Le nombre de travailleurs employés sur le secteur a chuté de 100 000 à 20 000 ouvriers. Les salaires des ingénieurs qui percevaient la zone comme un tremplin, se sont effondrés avec le départ et le désinvestissement étranger. Les conditions de logement sont devenues intolérables.
A ces remous intérieurs, s’ajoute la mise en examen plus que probable de membres importants du renseignement et de la sécurité du Hezbollah, au Liban, dans l’enquête sur l’attentat contre Rafic Hariri, en 2005. C’est une véritable bombe à retardement pour ce pays vassalisé par Téhéran. 8 des 20 téléphones mobiles retrouvés sur les lieux du crime par les enquêteurs, appartenaient ou remontaient vers les forces spéciales et l’appareil de renseignement du mouvement chi’ite, impliquant notamment des Commandants importants du Parti de Dieu.
Ces menaces qui pèsent sur l’entourage de Nasrallah coïncident avec l’évaluation des dégâts relatifs aux sanctions, en Iran.
La campagne récente contre un présumé réseau d’espionnage israélien contrôlant les télécommunications libanaises, s’inscrit dans cette stratégie de défense. Elle vise à discréditer la réalité des preuves contre ses propres agents impliqués dans le meurtre de Rafic Hariri. Son fils, Saad, n’a évoqué devant Nasrallah que l’existence « d’éléments rebelles » au sein de son mouvement, qui auraient agi pour leur propre compte.
Mais, il n’a pu écarter l’éventualité d’un conflit, interne ou externe. Fin août/début septembre, lorsque le Tribunal émettrait de tels mandats d’arrêt, personne, dès lors, ne pourra plus les ignorer.
La milice n’aura, alors, que deux sortes d’échappatoire possible, pour manifester sa désobéissance :
- Le déclenchement d’une nouvelle guerre contre Israël, pour un prétexte quelconque. Mobilisés, les inculpés éventuels ne pourraient répondre à une convocation.
- Celui d’une guerre civile, suite au refus des membres du Hezbollah de se laisser arrêter, en employant les forces à leur disposition, contre toute autorité inférente...
Voilà qui arrangerait, provisoirement, les affaires d'Ahmadinedjad et Khamenei...