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23 avril 2011 6 23 /04 /avril /2011 22:37

De retour de Syrie, l’analyse de Khaled Asmar - Beyrouth

SYRIE : Le massacre se poursuit. Mais après "le peuple veut la chute du régime", le slogan devient "le peuple veut comprendre le discours du président" !

Les auteurs du printemps de Syrie ont leur logique : le fruit du printemps murira en été, et le régime tombera à l’automne


lundi 18 avril 2011 - 00h44, par Khaled Asmar - Beyrouth

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Le discours creux du président Assad, samedi devant le nouveau gouvernement, transmis à la télévision, a suscité l’ironie des Syriens. Désormais, ils remplacent leur slogan « le peuple veut la chute du régime » par « le peuple veut comprendre le discours du président ». Une image qui symbolise parfaitement le rejet de la vieille langue de bois du Baas.

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Contrairement à la propagande du régime, la situation en Syrie est alarmiste. Lors d’un séjour de dix jours, entre la côte et Damas, nous avons constaté une réelle peur qui s’empare de la population abandonnée seule et désarmée face à un régime qui n’hésite pas à utiliser une force excessive contre des civils, « une force destinée à libérer la Palestine, mais qui s’est déversée sur le peuple syrien, après avoir été expérimentée contre les Libanais », regrettent nos interlocuteurs.

D’ailleurs, il convient de noter que nos interlocuteurs sont terrés chez eux, n’osent plus sortir. Les universités sont fermés jusqu’à nouvel ordre, et les étudiants sont renvoyés chez eux. Nous avons rencontré une famille de Damas, dont le fils aîné est inscrit à la faculté de médecine de Lattaquié. Son campus est fermé depuis deux semaines, l’obligeant à regagner la capitale pour encore au moins deux semaines, dans l’espoir d’un hypothétique rétablissement de la situation. A Damas, la situation n’est pas meilleure. La population vit dans un état d’urgence permanent. La prudence pousse les citoyens à ne plus communiquer, par peur de se trahir et de révéler à leurs interlocuteurs leurs doutes et leurs craintes, ou leur dégoût et leur rejet du régime. Car, rappellent-ils, les services de renseignement (Moukhabarate) sont systématiquement au « troisième bout du fil », et les disparitions nocturnes deviennent ainsi systématiques.

Cette situation a particulièrement nui au commerce et au tourisme. Les Syriens ne sortent plus, les tour-operators français ont suspendus les départs vers la Syrie jusqu’au 30 avril, et les mariages programmés ces prochains mois sont en suspens. Plusieurs familles syriennes vivant en France, et qui devaient se rendre à Alep et à Qamichli, pour des raisons familiales, ont annulé leur déplacement... Le pays a entamé sa chute et les recettes du régime, héritées du stalinisme, ne lui permettent plus de briser le cercle infernal.

Promesses et langue de bois

Le discours du président Bachar Al-Assad, prononcé samedi devant des ministres tétanisés par la peur et qui ressemblent à des statues immobiles, relevait de la pure langue de bois. A ce titre, les propos d’Assad ont produit un effet inverse et dopé les manifestations de ce dimanche, qui ont touché l’ensemble du territoire syrien. A Homs et dans sa région, la répression a fait au moins 24 morts ce dimanche soir (cinq à Homs, 17 à Talbissah et 3 à Al-Rastan, deux villes situées au nord de Homs. Des dizaines de blessés sont également signalés, alors que les ambulances sont empêchées de les secourir malgré les appels de la population (lancés notamment à travers les mosquées). A Soueida (Sud), plusieurs manifestants ont été blessés, dont Hani Al-Atrache, le petits-fils de Sultan Pacha Al-Atrache, le père de la Révolution syrienne contre le mandat français. L’ironie fait que ce 17 avril, la Syrie devait fêter l’anniversaire de son indépendance (17 avril 1946). A Lattaquié, un massacre commis dans la soirée de dimanche aurait fait une vingtaine de victimes, dont un enfant et des femmes...

Contrairement à la propagande du régime et de ses alliés, le peuple syrien est impatient. Le régime et ses porte-voix (comme notamment les télévisions libanaises « New TV », « Al-Manar » et « OTV ») rappellent que « ceux qui prétendent avoir été privés de leurs droits pendant 48 ans peuvent attendre une semaine » (sic l’éditorial de « New TV », dans son journal de la nuit de dimanche). Rien à faire, le peuple n’est plus dupe et refuse d’accorder à Assad le moindre sursit. Il radicalise ses revendications car il est conscient que le régime syrien est lâché par tous et prend l’eau de toutes parts.

L’ironie est que ce régime, qui a transformé la Syrie en plaque tournante du terrorisme régional et du trafic d’armes vers le Liban et l’Irak, n’a rien trouvé de mieux que d’accuser les Libanais et les Irakiens d’armer les Syriens. Si les Irakiens avaient longtemps accusé la Syrie de complicité avec Al-Qaïda en Mésopotamie - sept kamikazes sur dix qui se font exploser en Irak transitaient en Syrie, depuis l’intervention américaine en 2003 - et menaçaient de réexporter ce terrorisme à l’expéditeur, il n’en est pas de même pour les Libanais. D’autant plus que les seuls partis libanais, armés jusqu’aux dents, sont les alliés de Damas. D’ailleurs, selon le site « Middle East Transparent », quatre trafiquants arrêtés par l’armée libanaise ont avoué « agir à la demande de Maher Al-Assad, le frère du président syrien et commandant de la Garde présidentielle, qui a commandé 10.000 fusils à pompe pour le compte des bandes criminelles qu’il dirige », surnommées les « Chabbiha ».

Une fin tragique de l’impunité ?

Avec désespoir, le régime syrien cherche une bouée de sauvetage qu’il ne trouve plus. Israël, soupçonné d’avoir partagé les rôles avec le régime syrien, notamment pour liquider la cause palestinienne (Assad père s’est occupé d’Arafat et a achevé l’OLP entre 1983 et 1985 à Tripoli) et occuper le Liban (entre 1976 et 2005, les deux pays se sont partagés le territoire, l’espace aérien et les richesses du pays du Cèdre), riposte avec une grande et étonnante retenue aux provocations palestiniennes depuis Gaza. Le Hamas et autres factions, dirigées depuis Damas, multiplient les tirs de missiles sur l’Etat hébreu pour l’attirer dans une nouvelle guerre contre Gaza susceptible de détourner l’attention de la communauté internationale et permettre à Assad de raser les foyers de contestation en toute impunité.

Cette retenue israélienne confirme que la donne régionale a changé. Après la chute du régime de Hosni Moubarak en Egypte, l’équilibre stratégique a été rompu au profit de la Syrie, et le maintien d’Assad au pouvoir n’est donc plus une priorité. Bien au contraire. De plus, l’histoire nous enseigne que les peuples finissent toujours par l’emporter contre les dictatures. De ce fait, il n’est pas de l’intérêt d’Israël de soutenir Assad, en perte de vitesse, contre les futurs maîtres du pays.

La Turquie, qui a autorisé la semaine écoulé des Syriens et des Turcs d’origine syrienne à manifester contre Assad, semble également prendre ses distances avec le dictateur. L’Iran, qui affirme soutenir Assad, semble avoir préparé son « plan B » en armant, depuis 2009, des clans syriens acquis à Téhéran, comme nous l’avions expliqué en novembre 2009, avec la saisie d’une cargaison d’armes iraniennes à la Syrie, à bord du « Francop ».

L’automne portera les fruits du printemps ?

De ce fait, personne ne peut pronostiquer de l’avenir proche du régime. Mais les Syriens rencontrés ces dix derniers jours affirment formellement que « leur printemps est prometteur, que le fruit de leurs efforts murira en été, et que le régime tombera dès l’automne »...

Ceux qui ont cru à la propagande de Damas selon laquelle la Syrie sombrera dans le chaos, comme l’Irak d’après Saddam Hussein, si le régime était renversé, découvriront rapidement la supercherie syrienne. Car, il leur a sans doute échappé que le renversement d’Assad éliminera définitivement le bellicisme. En son absence, plus personne ne financera le terrorisme d’Al-Qaïda, ni celui de son allié du Hezbollah, encore moins les factions palestiniennes au Liban et à Gaza. Pourquoi, dans ces conditions, la Syrie sombrera-t-elle ? [Cliquez ici pour relire la complémentarité entre Al-Qaïda et le Hezbollah].

En définitive, de quel droit le régime syrien s’attribue-t-il l’exclusivité du bellicisme régional, et de quel droit ne voudrait-il pas en rendre des comptes ? Pour rappel, Assad, père et fils, ont usé de terrorisme d’Etat, directement ou par des intermédiaires, contre le Liban, Israël, les Palestiniens, le Koweït, l’Arabie saoudite, la Jordanie, l’Egypte, le Yémen, la France et la Turquie entre autres pays voisins, frères ou amis, depuis plus de quarante ans. Il est probablement temps que ce mode change, puisque le monde a changé.

Khaled Asmar

© Nos informations, analyses et articles sont à la disposition des lecteurs. Pour toute utilisation, merci de toujours mentionner la source« MediArabe.info »

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A tous nos chers lecteurs.

 

Ne vous est-il jamais venu à l'esprit d'en savoir un peu plus sur le titre de ce blog ?

Puisque nous nous sommes aujourd'hui habillés de bleu, il conviendrait de rentrer plus a fond dans l'explication du mot lessakel.

En fait Lessakel n'est que la façon française de dire le mot léhasskil.

L'hébreu est une langue qui fonctionne en déclinant des racines.

Racines, bilitères, trilitères et quadrilitères.

La majorité d'entre elle sont trilitères.

Aussi Si Gad a souhaité appeler son site Lessakel, c'est parce qu'il souhaitait rendre hommage à l'intelligence.

Celle qui nous est demandée chaque jour.

La racine de l'intelligence est sé'hel שכל qui signifie l'intelligence pure.

De cette racine découlent plusieurs mots

Sé'hel > intelligence, esprit, raison, bon sens, prudence, mais aussi croiser

Léhasskil > Etre intelligent, cultivé, déjouer les pièges

Sé'hli > intelligent, mental, spirituel

Léhistakel > agir prudemment, être retenu et raisonnable, chercher à comprendre

Si'hloute > appréhension et compréhension

Haskala >  Instruction, culture, éducation

Lessa'hlen > rationaliser, intellectualiser

Heschkel > moralité

Si'htanout > rationalisme

Si'hloul > Amélioration, perfectionnement

 

Gageons que ce site puisse nous apporter quelques lumières.

Aschkel pour Lessakel.

 

 

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