Les jihadistes d'Al-Nosra contrôlent un poste-frontière avec l'Irak ; l'opposition évoque un "massacre" de 72 personnes à l'est d'Alep.
La Russie a estimé vendredi que les décisions prises à Rome à la conférence des "Amis du peuple syrien", dont celle de Washington d'accorder des aides directes aux rebelles, encourageaient les "extrémistes" à prendre le pouvoir par la force, "malgré les souffrances des Syriens qui seront inévitables".
"De notre point de vue, l'objectif urgent actuellement est d'arrêter immédiatement l'effusion de sang et les violences, et d'instaurer un dialogue politique", a déclaré le porte-parole de la diplomatie russe, Alexandre Loukachevitch, cité dans un communiqué, ajoutant que l'idée qu'il "n'y avait pas de solution militaire à la crise en Syrie avait mûri au sein de la communauté internationale".
"Les Etats-Unis ne souhaitent pas se salir les mains en fournissant directement des armes aux rebelles, parce qu'il y a dans leurs rangs des terroristes et d'autres personnalités avec lesquelles les Etats-Unis n'aimeraient pas être associés au risque de ternir leur réputation", a renchéri l'ambassadeur russe auprès de l'ONU, Vitali Tchourkine, dans une interview à la chaîne de télévision Russia Today, proche du Kremlin.
Jeudi, les Etats-Unis ont annoncé une aide supplémentaire de 60 millions de dollars à l'opposition politique syrienne et, pour la première fois, des aides directes non létales à la rébellion, sans franchir le pas de la livraison d'armes. Washington fournissait déjà depuis des mois une aide non létale, mais cette assistance était acheminée via l'opposition politique syrienne et des ONG, à l'extérieur du pays.
L'Union européenne a de son côté formellement reconduit pour trois mois le régime de sanctions contre la Syrie et autorisé la fourniture d'équipements non létaux et d'une aide technique à l'opposition pour assurer la protection des civils.
"Attiser la violence et le terrorisme"
"Dans un nouvel épisode de la série intitulée 'Conférence des Amis de la Syrie', l'Occident (....) a continué d'exploiter la crise en Syrie et le sang des Syriens (...) en incitant à davantage de terrorisme", a pour sa part réagi le quotidien gouvernemental, Techrine. Le secrétaire d'Etat américain John "Kerry (...) oublie qu'une solution politique se fait à travers le dialogue et non en fournissant à certaines parties des armes qui seront dirigées contre l'Etat syrien", indique le journal.
M. Kerry avait indiqué à Rome que l'aide se ferait sous forme d'"aide médicale et de nourriture".
Concernant l'aide européenne, le journal affirme qu'elle "attisera la violence et le terrorisme" et "donnera une légitimité à l'armement du Front Al-Nosra qui est lié au réseau terroriste el-Qaëda", en référence au groupe jihadiste rebelle de plus en plus influent sur le terrain.
Depuis le début de la révolte qui s'est transformée en conflit armé faisant près de 70.000 morts en bientôt deux ans, selon l'ONU, Damas assimile opposants et rebelles à des terroristes financés notamment par l'Arabie saoudite et le Qatar et dénonce un "complot" occidental contre la Syrie.
L'opposition et la rébellion, faiblement équipée, réclament de leur côté des armes de la communauté internationale pour lutter contre la puissante armée du régime. Mais les pays occidentaux y sont réticents, craignant que l'arsenal ne tombe aux mains de groupes extrémistes.
La situation syrienne sera, aujourd'hui à Ankara, au cœur des discussions de John Kerry, avec son homologue turc Ahmet Davutoglu, le chef du gouvernement Recep Tayyip Erdogan et le président Abdullah Gül.
Ankara et Washington sont sur la même ligne concernant la Syrie. Les dirigeants turcs sont clairement engagés du côté des rebelles contre le président Assad, alors que la Turquie accueille quelque 200.000 réfugiés syriens. Comme l'Allemagne et les Pays-Bas, les Etats-Unis ont aussi déployé sur le sol turc, sous couverture de l'Otan, deux batteries de missiles sol-air Patriot destinées à le protéger en cas d'une éventuelle frappe de missiles venue de Syrie.
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