Netanyahyou concurrencé par Tzipi Livni, Shelly Yacimovitch
On doit évaluer l’atout-maître du chef du Likoud, le Premier Ministre Binyamin Netanyahou, à l’aune de sa fiabilité en tant que dirigeant. Alors qu’il reste le favori au poste de Premier ministre incontesté dans tout sondage d’opinion, 17 jours avant l’élection générale en Israël, son parti – le ticket conjoint Likoud-Yisraël Beitenou – est sur une pente glissante (>34) par rapport à son taux initial de 47 sièges.
Les cachoteries et l’ambiguïté de Netanyahou sur la sécurité et la paix, les problèmes qui déterminent, en dernier ressort, le résultat des élections israéliennes et le sort de ses hommes politiques, laissent son parti désarmé face aux tactiques sans merci de l’opposition et divisent son propre camp.
Alors qu’il garde sous son chapeau ses réalisations indubitables dans ces domaines, il devient difficile de ne pas relever ses erreurs et lacunes.
Il y a cinq mois, on s’est aperçu que Netanyahou reportait brusquement ses plans d’attaquer le programme nucléaire iranien, après avoir déclaré, durant des années, que l’Iran doté de l’arme nucléaire était la menace la plus dangereuse à laquelle Israël est confronté. Ce qui s’est passé, c’est que, le 5 septembre, il a brutalement conclu une réunion du cabinet de sécurité et de la diplomatie à propos de l’Iran, sans explication, excepté pour jeter à la face des participants qu’aucun forum compétent dans la direction des politiques envers l’Iran n’était une garantie contre les fuites dans la presse.
Pour la majeure partie du pays, Netanyahou a perdu des points en cessant de poursuivre cette résolution de longue haleine. Sa démonstration sur un bout de carton concernant les « lignes rouges » devant l’Assemblée Générale de l’ONU, le 27 septembre, n’a rien changé à cette impression générale. Il s’est exprimé pour remettre jusqu’au « prochain printemps ou au début de l’été » une action vitale pour la sécurité d’Israël – apparemment par allégeance à Washington et prenant en considération la campagne de Barack Obama en vue de sa réélection.
Puis, après des mois de silence, le jeudi 3 janvier, le Premier ministre s’est levé devant l’assemblée des envoyés d’Israël dans les capitales mondiales, pour les informer : « L’Iran est toujours notre menace n°1. J’ai montré ce qu’étaient nos « lignes rouges » et l’Iran ne les a pas encore franchies. Notre engagement était et reste d’empêcher l’Iran d’obtenir des armes nucléaires ».
Ces paroles ont eu le même effet que les sentiments entendus de la bouche du Président américain. Ce que ces deux-là ont en commun est la distance entre les discours et les faits.
Au cours des derniers mois, l’Iran a développé une stratégie visant à contourner les « lignes rouges » sur le volume d’uranium enrichi à 20%, en annonçant périodiquement la suspension du processus ou la diversification des stocks sous prétexte de « recherche médicale ».
Cette stratégie est passée, pour ainsi dire, inaperçue, alors qu’on aurait dû s’en préoccuper pour quatre raisons :
1. Les quantités de matériaux fissiles qu’annonce Téhéran sont invérifiables par les renseignements israéliens ou occidentaux – ou même par l’Agence à l’Energie Atomique à Vienne.
2. La dispute interminable entre l’Iran et les puissances mondiales sur les quantités d’uranium enrichi de niveau moyen nécessaires et suffisantes pour fabriquer une bombe n’est plus pertinente, parce que le consentement de Téhéran à des « négociations » avec les puissances mondiales a donné du temps à l’Iran pour acquérir le savoir-faire lui permettant d’assembler des bombes nucléaires et les rendre opérationnelles. Les quelques kilos d’uranium enrichi manquants, çà et là, sont faciles à obtenir, soit par la production intérieure ou des acquisitions étrangères. Le graphique des « lignes rouges » de Netanyahou, effectives à ce moment-là, est, à présent, dépassé par les évènements.
3. Et son silence durant cinq mois a convaincu les dirigeants à Téhéran qu’ils n’ont plus besoin de craindre une frappe militaire contre leurs sites nucléaires.
4. L’Iran a utilisé ces quelques mois en restant libre de toute pression internationale et des foudres israéliennes, pour faire des pas de géant dans le développement d’armes à base de plutonium. Les déclarations de Netanyahou, qui se vante d’avoir placé la menace nucléaire iranienne au sommet de l’agenda mondial comporte un inconvénient de taille : En préambule d’une préparation du terrain en vue d’une politique militaire proactive, c’était efficace ; cependant, l’écart entre la rhétorique et l’action a porté préjudice à la crédibilité d’Israël et écorné sa dissuasion stratégique.
Les questions des armes chimiques de la Syrie et du Hezbollah marquent le même écart quant à la crédibilité des mises en garde. Le Premier ministre Netanyahou, ses ministres et diplomates, ont promis de façon répétée, qu’Israël prendrait des mesures pour empêcher que des armes non-conventionnelles tombent entre les mains de terroristes, y compris celle du groupe chi’ite libanais Hezbollah, dont le dirigeant Hassan Nasrallah déclare souvent que ses roquettes peuvent atteindre chaque recoin d’Israël –« de Kyriat Shemone à Eilat ! ».
Il y a un an, en janvier 2012, un certain nombre de sources occidentales et arabes ont confirmé que le dirigeant syrien Bachar al Assad avait transféré une partie de son arsenal d’armes chimiques vers les bastions du Hezbollah, dans la Vallée de la Beka’a et que des unités du Hezbollah avaient été entraînées à leur usage.
Le mois dernier, le coordinateur politique du Ministère de la Défense, Amos Gilad a fermement certifié que les armes chimiques syriennes étaient « sous contrôle ». Mais cela ne valait pas pour un déni que ces armes non-conventionnelles soient encore sous le contrôle logistique conjoint de l’Iran, de la Syrie et du Hezbollah. Il est possible que Netanyahou ait opté jusqu’à un certain point pour le fait de suivre les directives d’Obama en matière de sécurité, concernant l’Iran, la Syrie, le Hezbollah et le Hamas. Même dans ce cas, il lui faut faire un meilleur travail pour offrir un peu plus de consistance à l’électeur israélien. Au lieu de quoi, il n’apporte que son silence, ou, au mieux, des messages vagues et généraux que rendent l’électeur perplexe et maintiennent son propre parti dans la tourmente et l’incertitude.
D’un côté, il s’est exposé au ressentiment populaire pour avoir maintenu en suspension pour rien, 50 000 réservistes de l’armée, durant l’opération anti-terroriste de novembre à Gaza. Mais, de l’autre, son gouvernement et son parti ne recueillent aucun bénéfice du crédit de plusieurs semaines de calme total sur le front de Gaza, depuis le 21 novembre –la première fois que le Hamas ait jamais honoré un cessez-le-feu depuis une décennie.
Pas plus ne sort-il la tête haute des trois avantages supplémentaires qu’il a acquis en travaillant avec Obama et ses collaborateurs, l’Egypte, la Turquie et le Qatar, en vue de négocier ce cessez-le-feu. Ils pourraient représenter, pour la campagne de son parti à l’élection, un coup de pouce absolument nécessaire.
L’un correspond à l’amélioration des relations avec le gouvernement d’Erdogan en Turquie, après des années d’acrimonie. Il résulte du consentement d’Israël de soutenir l'entreprise du Président américain, cherchant à associer ces trois nations -plus le Hamas palestinien - en un nouvel axe musulman-sunnite pro-américain. Netanyahou a donné son accord à un assouplissement de l'attitude d'Israël envers le Hamas, faisant le pari des avantages à tirer d'un rapprochement avec Ankara et d'une stabilisation des relations avec l'Egypte dirigée par les Frères Musulmans.
Lisant cette nouvelle topographie, l’Autorité Palestinienne, sous l’égide de son dirigeant du Fatah, Mahmoud Abbas, attise les troubles dans la Bande Occidentale de Judée-Samarie, comme un moyen de rappeler son existence à Washington et Jérusalem. Bien que lorsqu’il rencontre les ambassadeurs à Jérusalem, Netanyahou se soit exprimé sur le danger que représenterait la prise de contrôle, par le Hamas, de la Bande Occidentale de Judée-Samarie, comme à Gaza en 2007, ce point est en contradiction avec sa décision de reculer devant l’idée de vaincre le Hamas, au cours de l’opération de novembre. Et, la semaine dernière, il a ouvert les points de passage de Gaza aux matériaux de construction aussi bien qu’à des transferts d’argent liquide, pour la première fois depuis six ans.
Le Premier ministre a, certes, un long chemin à faire avant d'entraîner son parti du centre-droit dans une politique d'ouverture envers le Hamas – même si cela contribuerait à conjurer les accusations de l’opposition disant qu’Israël est diplomatiquement isolé. Bien qu’il ait investi des efforts considérables pour dégeler le processus de paix pris dans les glaces, avec les Palestiniens, il est très gêné de l’annoncer carrément comme un élément-clé de l’agenda du parti, parce que ce point n’obtiendrait aucun consensus.
Tous les sondages d’opinion montrent que, contrairement à la rhétorique de l’opposition de centre-gauche, une majorité d’Israéliens n’a aucune confiance dans les Palestiniens, y compris Mahmoud Abbas, pour qu’ils deviennent, un jour, des partenaires de négociation ou acceptent une coexistence pacifique. Pas plus que la plupart des Israéliens ne souscrivent à la condamnation internationale de la politique de Netanyahou, consistant à renforcer Jérusalem et les blocs d’implantation dans la Bande Occidentale de Judée-Samarie et la Vallée du Jourdain.
L’électeur israélien a tendance à juger toute mesure prise par le gouvernement selon les termes de sa sécurité personnelle et financière et de celle de sa famille.
En maintenant l’électeur dans l’obscurité, il affaiblit les perspectives électorales de sa coalition Likoud-Israël Beitenou, en tant que parti. Et en s’alignant trop étroitement sur Obama concernant l’Iran et le Moyen-Orient, il provoque le franchissement, par les factions les plus extrêmes de son parti, des lignes qui les séparent encore du parti nationaliste-religieux Habayit Hayehudi et de son nouveau dirigeant, Naftali Bennett. Là, ils trouvent un agenda clairement articulé, appelant à des positions israéliennes indépendantes sur le coeur des problèmes de sécurité, de paix avec les Palestiniens, des frontières et des implantations juives.
A l’extrême opposé du spectre, les partis d’opposition de centre-gauche accusent Netanyahou et Lieberman de mener des politiques d’extrême-droite conduisant à la guerre, qui menacent le pays d’un véritable désastre. Leur campagne se transforme pour devenir de plus en plus sauvage et personnalisée, plutôt qu'orientée sur la résolution des problèmes courants. Même si l’alliance entre le Likoud et Yisraël Beitenou subit un déclin dans les sondages ( perdant dix sièges, depuis novembre, à 34 annoncés, à la Knesset, qui est constituée de 120 membres), ses rivaux se cognent la tête contre les murs, à cause du solide soutien dont jouit Netanyahou (+43%), en tant que favori pour le poste de Premier ministre.
Le contraste est frappant, entre la popularité déclinante du parti de Netanyahou et son taux de popularité personnelle en tant que dirigeant.
Le bloc du Likoud est suivi par le Parti Travailliste de Shelly Yachimovich (16 sièges), Habayit Hayehudi de Bennett (14), le Shas ultra-religieux et le nouveau Yesh Atid (Il y A un Avenir)- 11 sièges chacun ; Hatenua (Le Mouvement), fondé par l’ancienne ministre des affaires étrangères, Tzipi Livni, vient ensuite, avec 10 sièges.
Vendredi soir, le 4 janvier, Livni a publiquement exhorté les dirigeants du parti travailliste et de l’Avenir d’unir leurs forces pour empêcher Netanyahou de former le prochain gouvernement, après l’élection du 22 janvier. Les experts estiment que si les dirigeants d’Hatenua, du Parti Travailliste et d’Avenir parviennent réellement à forger une plateforme commune, ils pourront compter sur environ 40 sièges à la Knesset, à comparer aux 51 du bloc de centre-droit. Cependant, la multiplicité des partis israéliens signifie qu’aucun groupe à lui tout seul n’a jamais réalisé une majorité parlementaire sans faire appel à d'autres partenaires de coalition. Cette situation rend la partie extrêmement fluctuante entre les divers blocs, quand vient le temps de construire une coalition de gouvernement.
DEBKAfile Analyse Exclusive 5 Janvier 2013, 11:33 AM (GMT+02:00)
http://www.debka.com/article/22660/Likud-loses-ground-over-Netanyahu%E2%80%99s-fuzzy-security-messages
Adaptation : Marc Brzustowski.