Le Gen. Commandant les Chefs d’Etat-Major Martin Dempsey
Les différences essentielles entre les Etats-Unis et Israël ont refait brusquement surface, jeudi 1er décembre, autour du minutage et des circonstances d’une attaque contre les installations nucléaires iraniennes, quand le Général Martin Dempsey, président de l’Etat-Major conjoint des Chefs de l’armée US, a déclaré : « Je ne sais si Israël alerterait à l’avance les Etats-Unis, s’il décidait de lancer une action militaire contre l’Iran ». Trois heures plus tard, le Ministre de la Défense israélien, Ehud Barak maintenait que la politique américaine pourrait permettre à l’Iran d’obtenir une arme nucléaire, en ne laissant pas la possibilité de l’attaquer préventivement.
Au cours d’une interview, le Général Dempsey a poursuivi en admettant une gamme de différences entre les Etats-Unis et Israël sur deux problèmes-clés : le premier tient à leurs attentes quant aux sanctions et aux mesures diplomatiques prises par l’Administration Obama, « ajoutées aux déclarations affirmant n’exclure aucune option de la table » - langage qui laisse ouverte la possibilité d’actions militaires dans l’avenir. « Je ne suis pas sûr que les Israéliens partagent nos perspectives » sur le sujet, a dit le général américain. Le second problème sur lequel Américains et Israéliens sont divisés concerne leurs projections sur le cours futur des évènements relatifs au programme nucléaire iranien et à son influence sur le Moyen-Orient : « Et… parce que, pour eux, c’est (un Iran doté de l’arme nucléaire) une menace existentielle, je pense qu’il est juste de dire que, dans l’immédiat, nos attentes sont différentes », a expliqué le Général Dempsey.
Lors d’une interview à la radio, un peu plus tôt dans la matinée, Ehud Barak a posé les cartes d’Israël sur la table avec une franchise inhabituelle : Il a déclaré qu’il serait heureux que les gestes diplomatiques et les sanctions soient à même de stopper le programme nucléaire de l’Iran et que cela rende possible de renoncer à l’option militaire, mais qu’il ne pense pas que cela puisse être le cas.
“Ils (les Américains) nous affirment : “Qu’est-ce qui presse, pour déclencher une attaque sur l’Iran? Attendez jusqu’à ce que (l’Ayatollah) Khamenei annonce que l’Iran quitte le TNP (Traité de Non-Prolifération). Les Iraniens feront sauter les verrous (L’inspection de l’AIEA scelle les sites d’enrichissement d’uranium iranien) et, ainsi, il sera clair pour tout le monde qu’ils ont une arme nucléaire en leur possession ».
Barak a ajouté : “la différence entre les Américains et nous est la suivante : Nous disons que, puisque les Iraniens sont très pressés de transférer leur programme nucléaire vers des installations souterraines, ils peuvent annoncer cette acquisition (de l’arme nucléaire) juste après, de façon à ce qu’il ne soit plus possible de les attaquer ». Il a poursuivi en avertissant que si Israël se trouve ainsi renvoyé dans ses cordes, « Il devra agir ».
En d’autres termes, Israël ne veut pas attendre, comme le propose l’Administration Obama, jusqu’au moment où les actions diplomatiques et les sanctions contre l’Iran auraient atteint leur but, essentiellement parce qu’Israël n’est pas prêt à laisser l’Iran achever le transfert souterrain de ses installations nucléaires, les rendant ainsi immunes à toute attaque.
Selon les sources du renseignement militaire de Debkafile, Israël ne donne pas plus de six à huit mois à l‘Iran pour achever son transfert, ce qui veut dire autour de juin à août 2012.
Un autre point apporté par le Ministre de la Défense israélien consistait à dire que certaines installations nucléaires iraniennes étaient déjà cachées dans des tunnels et qu’elles sont, par conséquent, impossibles à observer, même par des satellites militaires. Selon nos sources, il faisait spécifiquement référence au site du bunker de Fordo, près de Qom, où, selon des données du renseignement, l’Iran est sur le point de commencer à enrichir de l’uranium de 20% à 60%. Cela rapprocherait le programme à quelques semaines du niveau requis pour des armements, du type d’une bombe ou d’une ogive.
Mardi 29 novembre, l’ancien chef du renseignement militaire, le Général-Major (retraité) Amos Yadlin a estimé que l’Iran avait déjà accumulé suffisamment d’uranium enrichi pour fabriquer 4 à 5 bombes nucléaires.
Dans son interview, mardi, le Ministre de la Défense Barak, a aussi répondu à l’argumentaire persistant de l’ancien chef du Mossad, Meïr Dagan, opposé à une frappe militaire contre l’Iran, au motif que cela déclencherait immédiatement une guerre régionale : la Syrie, le Hezbollah, le Hamas et le Jihad islamique lanceraient des attaques sur Israël, provoquant de sérieux dégâts dans le pays et infligeant de lourdes pertes, selon le point de vue de Dagan.
Israël, a répliqué Barak, n’est pas prêt à se laisser paralyser par des messages annonciateurs de ruine. Le niveau de dommages et l nombre de victimes civiles ne devraient pas, selon son point de vue, alarmants. Il a réitéré son estimation de début novembre, que la configuration correspondant à un assaut arabe de missiles combinés, résultant d’une attaque contre l’Iran, serait « de beaucoup inférieure à 500 (morts) » - et en particulier si les gens se mettent à couvert.
Le Ministre de la Défense a conclu son commentaire en disant : « Je n’ai aucune idée sur ce qui peut arriver demain matin en Syrie, ou en Egypte ». Les sources militaires de Debkafile interprètent que cela signifie que le danger d’une nouvelle guerre régionale au Moyen-Orient est déjà présent – et sans lien à une éventuelle attaque israélienne contre l’Iran, mais plutôt comme conséquence de la volatilité instaurée par l’insurrection en Syrie et la prévisible montée au pouvoir des Frères Musulmans et des Islamistes salafistes en Egypte.
DEBKAfile Reportage spécial 1er décembre 2011, 11:28 AM (GMT+02:00)
http://www.debka.com/article/21529/
Adaptation : Marc Brzustowski.