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24 février 2008 7 24 /02 /février /2008 23:03

 

J’ai beaucoup hésité à traduire ce texte de l’excellent Krauthammer (d’autant que sa prose n’est pas des plus faciles à rendre en français). 'Qu’ont à faire nos internautes des arcanes des élections américaines ?', me disais-je, pour m’éviter ce travail. 'En outre', insistait mon instinct du moindre effort, 'ni moi ni nos lecteurs francophones ne sommes des électeurs américains potentiels'. Si j’ai passé outre à mes réticences, c’est que l’élection d’un Président des Etats-Unis nous concerne tous, directement ou indirectement, et que même si nous ne pouvons influer sur le choix du candidat, nous pouvons au moins nous préparer psychologiquement aux conséquences de cette élection. Après avoir lu ce qu’écrit Krauthammer, on peut augurer le pire de l’élection d’Obama. Je sais : Krauthammer est Républicain et viscéralement allergique à la gauche américaine, en général, et aux Démocrates, en particulier. Mais ce qui m’importe, en tant qu’observateur juif de l’influence politique américaine sur l’avenir de l’Etat juif, c’est de me préparer au choc. Si les Américains choisissent Obama, c’est qu’ils donnent la préférence à l’exaltation sur la raison, à l’illusion sur le réalisme, à l’aventure sur l’expérience, à la discrimination positive en faveur d’un Noir sur celle en faveur d’une femme, au messianisme politique miraculeux, enfin, sur la volonté politique d’affronter les énormes défis auxquels est confrontée l’humanité libre, face aux fanatismes religieux qui déstabilisent et ensanglantent les Etats de droit. Si l’Amérique choisit la voie pseudo-messianique, mieux vaut savoir qu’il n’y a guère plus rien de bon à attendre d’elle. Et savoir c’est prévoir. (Menahem Macina).

 

Texte original anglais : "Obama spell mesmerizing but empty. Candidate's appeal takes on cult quality".

 

Traduction française : Menahem Macina

 

Il n’est pas de meilleure voie vers le succès que d’amener les gens à acheter un produit qui ne coûte rien. Comme le génie qui a trouvé le moyen de faire payer l’eau : il l’a mise en bouteille (Aquafina s’est révélée n’être rien d’autre que de l’eau du robinet, retraitée) et l’a fait payer plus cher que l’essence. Ou encore, voyez comment Google a trouvé le moyen de vendre un dictionnaire de mots – 'bateau', 'chaussure', 'montre', etc. – en faisant payer des sommes folles à des firmes désireuses de figurer sur la liste des annonceurs, qui s’affiche à chaque fois que le mot fait l’objet d’une recherche.

Et maintenant, voici la plus stupéfiante des duperies : un sénateur sans expérience, mais à l'éloquence hors norme, a trouvé le moyen de vendre de l’espoir. Pour en bénéficier, il vous suffit de lui donner votre vote. Barack Obama est en train d’en gagner des millions.

Ce type de vente est loin d’être nouveau. Les organisations religieuses ont proposé un produit similaire – le salut – durant des millénaires. C’est pourquoi la campagne d’Obama donne l’impression d'un "réveil" religieux avec, comme l’a fait remarquer l’écrivain James Wollcott, une « ferveur salvifique » et « un zèle idéaliste, déconnectés de toute cause ou tendance politique particulière, et entraînés par un flot de pure euphorie. »

« Nous sommes l’espoir de l’avenir », dit Obama. Nous pouvons « recréer ce monde comme il devrait être ». Croyez en moi car je ne vais pas racheter que vous, mais votre pays... oui, nous pouvons devenir « un hymne qui guérira cette nation, réparera ce monde, et rendra cette époque différente de toutes les autres. »

Et ils le croient. Après huit victoires directes, Obama est sur le point de rendre discutable l'après-Super-Mardi, en critiquant une convention dans l'impasse avec ses super-délégués non élus qui décident de qui sera le candidat. A moins qu’Hillary Clinton puisse faire quelque chose dans l'Ohio et au Texas, le 4 mars - ce qui, Rudy Giuliani en est la preuve, est presque impossible à réaliser – pour conserver le pare-feu d’un grand Etat, après une incessante série de petites défaites, les super-délégués se rallieront à Obama. L’espoir l’aura emporté.

Chose intéressante : Obama a pu obtenir ces victoires électorales et éblouir des foules, successivement dans chaque nouvelle juridiction, même si son pouvoir hypnotique a commencé à engendrer du scepticisme et des doutes dans les grands médias.

Jake Tapper, de ABC, note le « vacarme cultuel caractéristique » des « fidèles d’Obama », ce que Joel Stein, du Los Angeles Times, appelle « le culte d’Obama ». Le discours de victoire d’Obama au Super Mardi a été un classique du genre. Son effet était électrisant, provoquant une ferveur rythmée dans le public, et allant jusqu’à une absurdité rhétorique telle que : « Nous sommes ceux que nous attendions. (Acclamations et applaudissements). Nous sommes le changement que nous voulons ».

C’en était trop pour Joe Klein, du Times.

« Il y a tout de même quelque chose de vaguement menaçant dans le messianisme de masse », écrit-il. « Le message est en train de devenir dangereusement autoréférentiel. La campagne d’Obama est trop souvent : Comme la campagne d’Obama est magnifique ! » 

On serait tenté d'écarter comme exagérée la plainte de Paul Krugman, du Times, selon laquelle « la campagne d’Obama apparaît comme dangereusement proche d’un culte de la personnalité ». Jusqu’à ce qu’on entende Chris Matthews, qui n’a plus l’excuse de la jeunesse, réagir au discours d’Obama, après sa victoire aux primaires du Potomac, par un : « Oh ! J’ai senti un de ces tremblements monter dans ma jambe » [*]. Quand ses collègues présentateurs de MSBNC tentèrent de le tirer de ce mauvais pas, il refusa de se rétracter. Ce qui n’a pas surpris un assistant, qui dit d’Obama : « il arrive et semble avoir toutes les réponses. C’est le Nouveau Testament ».

Je n’ai vu qu’un cas similaire d’extase nationale. Adolescent élevé au Canada, j’ai été témoin de l’ascension, de l’obscurité au poste de ministre de la Justice, puis à celui de Premier ministre, d’un professeur de droit plein de charisme, porté par la vague de ce qu’on a appelé la Trudeaumanie.

Mais même dans ce cas, l’objet de l’affection de ses compatriotes n’était pas une ardoise vierge. Pierre Trudeau était déjà un intellectuel sérieux qui avait beaucoup écrit, réfléchi et exposé ses vues en public, sur la nature et l’avenir de son pays.

Obama a un dossier étonnamment vide. Il va d’un endroit à un autre, distillant ses remarques sur un avenir qu'il ne peut raisonnablement sauver.

  • Des promesses de guérison du monde par des négociations avec des gens tels que le président de l'Iran, Mahmoud Ahmadinejad.
  • Des promesses de venir à bout des problèmes du droit à une réforme qui entraînera de véritables et douloureux compromis.
  • Des promesses de financer ses autres promesses par un retrait militaire rapide d’une guerre impopulaire, avec l'espoir, je suppose, que l'accroissement (présumé) du prestige américain compensera le chaos à venir.

 

Les Démocrates s’inquiètent de ce que l’enchantement suscité par Obama ne se dissipe entre le moment de sa nomination et celui de l’élection, et leur fasse perdre la Maison Blanche.

Mon sentiment est qu’il peut maintenir cet enchantement jusqu’à sa prise de fonction. Après quoi, aura lieu le réveil.

Il sera brutal. 

 

Charles Krauthammer

 

© The Chigago Tribune

 

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Note du traducteur

 

[*] Voir la séquence vidéo de cette 'sortie' mémorable du présentateur, dans "Matthews: Obama Speech Caused 'Thrill Going Up My Leg'".

 

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Mis en ligne le 24 février 2008, par M. Macina, sur le site upjf

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A tous nos chers lecteurs.

 

Ne vous est-il jamais venu à l'esprit d'en savoir un peu plus sur le titre de ce blog ?

Puisque nous nous sommes aujourd'hui habillés de bleu, il conviendrait de rentrer plus a fond dans l'explication du mot lessakel.

En fait Lessakel n'est que la façon française de dire le mot léhasskil.

L'hébreu est une langue qui fonctionne en déclinant des racines.

Racines, bilitères, trilitères et quadrilitères.

La majorité d'entre elle sont trilitères.

Aussi Si Gad a souhaité appeler son site Lessakel, c'est parce qu'il souhaitait rendre hommage à l'intelligence.

Celle qui nous est demandée chaque jour.

La racine de l'intelligence est sé'hel שכל qui signifie l'intelligence pure.

De cette racine découlent plusieurs mots

Sé'hel > intelligence, esprit, raison, bon sens, prudence, mais aussi croiser

Léhasskil > Etre intelligent, cultivé, déjouer les pièges

Sé'hli > intelligent, mental, spirituel

Léhistakel > agir prudemment, être retenu et raisonnable, chercher à comprendre

Si'hloute > appréhension et compréhension

Haskala >  Instruction, culture, éducation

Lessa'hlen > rationaliser, intellectualiser

Heschkel > moralité

Si'htanout > rationalisme

Si'hloul > Amélioration, perfectionnement

 

Gageons que ce site puisse nous apporter quelques lumières.

Aschkel pour Lessakel.

 

 

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