L’ingrédient essentiel de la vie
Par le Rabbin Berel Wein
Adaptation française* de Sentinelle 5768 ©
L’un des passages les plus fameux et les plus cités de la Torah se trouve dans la lecture de cette semaine – « l’homme ne vit pas que de pain ». Cette phrase est entrée dans la littérature mondiale sous toutes ses formes, mais elle n’est certainement pas entrée dans beaucoup de réalités de la vie humaine.
Beaucoup, si ce n’est la majorité des gens, croient encore que l’homme ne vit que de pain, et que la vie de l’esprit est agréable, mais n’est pas vraiment une part de ce monde et du fondement de notre existence.
La Torah souligne souvent, et en particulier dans cette série de passages que nous lisons actuellement, l’importance de la manne dans la formation d’un Peuple juif caractérisé par une foi et un esprit très poussés. La manne est la nourriture des anges – du paradis lui-même. Elle ne laisse pas de résidu dans le corps humain et apprête son goût selon les vœux de ceux qui la consomment. Elle apporte la nourriture spirituelle, mais ce n’est pas du pain ou une autre nourriture humaine. C’est la nourriture de l’esprit, de l’espérance, et du profond désir à la recherche de la divinité.
La manne a enseigné à Israël que la dépendance à l’égard de D.ieu est la réalité de l’existence humaine, et qu’en définitive, chacun doit manger la nourriture céleste pour vivre une existence ayant vraiment du sens. La manne ne peut pas être stockée pour un autre jour. Elle tombe fraîche chaque jour sauf à Shabbat, parce que ce jour là nous enveloppe lui-même de spiritualité pure – où rien de plus n’est nécessaire.
La manne est tombée chaque jour, et a servi de rappel constant que la relation entre le Créateur et sa créature est continuelle et permanente. Véritablement, l’homme ne peut pas vivre seulement de pain.
Quand le Peuple juif est entré finalement dans la terre d’Israël et s’y est installé, la manne a cessé de tomber. Le vrai pain était désormais nécessaire pour l’existence de la nation et de chacun de ses membres. Cela démontre et continue d’être l’un des tests suprêmes de la vie juive nationale et individuelle : comment une personne maintient le sens de la spiritualité tout en peinant pour gagner le pain dont il vit ?
Accorder du temps à l’étude de la Torah, accomplir les mitzvoth (devoirs religieux), et donner la priorité aux vraies valeurs juives dans nos vies, aide à répondre à cette question difficile. Le shabbat et les fêtes juives nous apportent aussi une évasion par rapport à la poursuite du pain seul, et nous permettent de recentrer notre attention sur notre relation Créateur-créature.
Ce n’est pas pour rien que les rabbins ont insisté pour que nos paroles et mêmes nos pensées à Shabbat et pendant les fêtes juives n’aient pas de relation avec le pain du labeur et du combat quotidiens. Au lieu de cela, nous devons traiter la nourriture de Shabbat comme si elle était d’origine céleste.
L’ingrédient secret de la nourriture à Shabbat, selon le Talmud, c’est le Shabbat lui-même. Pouvoir vivre au moins un jour de la semaine dans le monde de D.ieu, pour ainsi dire, et non par le pain de l’homme, est une véritable expérience spirituelle.
L’histoire de la survie et de la destinée juives pendant des millénaires incarne la preuve du verbe de la Torah – « L’homme ne vit pas que de pain ».