Mosquée de Genève: les fidèles humilient des collégiennes
«Espèces de sales Blanches! Vous n'avez pas honte ?» Insultées, raillées, reluquées et même photographiées au moyen de téléphones portables: une quinzaine d'élèves de l'Ecole de commerce André-Chavanne ont été prises à partie par un groupe d'hommes qui sortaient de la mosquée du Grand-Saconnex. Leur tort ? Elles couraient en tenue de gymnastique sur la piste d'athlétisme de leur école «durant l'heure de la prière».
L'affaire a mis en émoi élèves, professeurs, parents et jusqu'aux hautes sphères du Département de l'instruction publique (DIP). Elle a suscité une réaction énergique au sein de la mosquée. L'imam a violemment condamné ces agissements dans son sermon aux fidèles. Aujourd'hui, les rapports de bon voisinage seraient de retour.
Vendredi 3 avril, début d'après-midi: les élèves, âgées d'une quinzaine d'années, s'exercent sur la piste de course. Une dizaine de personnes, qui sortent de la prière, se retrouvent face à elles. Pour retourner au parking, elles ont emprunté un raccourci, un chemin nouvellement ouvert au public qui débouche sur le terrain de sport.
Au lieu d'éviter de passer sur la piste, les hommes du groupe, jeunes et moins jeunes, se plantent au beau milieu. Ils perturbent la course, shootent les cônes de plastique disposés pour l'exercice. Ils insultent les élèves, les matent grossièrement, les prennent en photo, leur reprochent leurs tenues impudiques puis finissent par se retirer.
Choquée, la jeune prof de gymnastique qui les encadre dénonce les faits à la direction de l'école. Le 6 avril, le directeur, Roland Jeannet, alerte sa hiérarchie et envoie un courrier aux responsables de la mosquée: «Je vous prie d'intervenir lors des prochaines rencontres à la mosquée pour inciter vos fidèles à plus de respect.»
«L'imam a très bien réagi. Dès le vendredi suivant, il a consacré une longue partie de son sermon à cette question», raconte Roland Jeannet. «J'ai depuis reçu des lettres de fidèles qui fustigeaient l'attitude de ces hommes et craignaient pour l'image des musulmans.» Une réunion entre la direction, deux représentants de la mosquée et une îlotière de la police a eu lieu fin avril. Elle a rassuré l'établissement scolaire, qui n'a pas déposé de plainte.
Du côté de la Fondation culturelle islamique, on dit avoir pris l'affaire très au sérieux. «Les musulmans doivent montrer l'exemple, surtout dans ce contexte où ils sont souvent montrés du doigt», affirme un de ses responsables.
Il n'y a pas eu précédemment d'incident de voisinage marquant entre la mosquée et le collège, situé à trois jets de pierre. «Mais je suis parfois un peu mal à l'aise quand les parkings dans les alentours sont envahis par des centaines d'hommes qui se rendent à la prière», témoigne une prof. Une enseignante de gymnastique parle de regards insistants sur la poitrine des jeunes filles qui courent. Il n'est pas exclu que le fameux raccourci entre l'édifice religieux et les parkings soit de nouveau fermé.
Source: Mathieu Cupelin, Le Matin - samedi 16 mai 2009