Merci à Bellar pour ce signalement d'article! M. Obama et la Boite de Pandore. |
Par Sydney Touati pour Guysen International News |
Samedi 6 juin 2009 à 22:46 |
Le Président des Etats-Unis souhaite ouvrir une nouvelle ère dans la politique internationale. Ses différentes initiatives depuis sa nomination à la Maison Blanche trouvent dans le discours prononcé au Caire ce 4 juin 2009, leur véritable point d’orgue. |
Monsieur Obama veut en finir avec la logique du conflit qui aurait été celle de son prédécesseur. Depuis la tribune cairote, il s’adresse aux musulmans du monde entier pour leur dire en substance, l’Amérique n’est pas votre ennemi et vous n’êtes pas l’ennemi de l’Amérique. Quels sont les éléments fondamentaux contenus dans ce discours de paix, de la main tendue, de l’ouverture, de l’appel au dialogue ? Les Etats mis au second plan. Son adresse aux musulmans consacre un fait soigneusement éludé jusqu’à présent dans les discours politiques : celui de l’existence politique d’un monde musulman, d’une Nation musulmane débordant les frontières étatiques, ayant une réalité supérieure aux Etats. Le Président des Etats-Unis ne s’adresse pas à un Etat, mais à une entité, à une nébuleuse dont l’unité semblait relever du mythe ou de soubassements civilisationnels profonds. D’un coup, M. Obama inscrit cette réalité mythique ou idéologique ou religieuse dans l’espace du politique. La Nation musulmane existe. M. Obama veut la rencontrer et s’adresser à elle en direct. Il existe donc un monde musulman dont la dimension politique est aujourd’hui officiellement reconnu. C’est avec lui qu’il faut traiter si l’on veut parvenir à la paix, notamment au Moyen-Orient. Mais, dans le même temps où il investit de manière concrète le mythe de la Nation musulmane, M. Obama laisse entendre que jusqu’à son élection, les Etats-Unis étaient hostiles à ce même monde musulman. Or cela est faux. Jamais les Etats-Unis n’ont eut une politique anti-musulmane. M. Obama valide ainsi l’approche de ce que l’on appelle les extrémistes islamistes. Ces derniers ont toujours affirmé, pour justifier leurs agressivités et leurs actions terroristes, que l’Amérique, qu’ils qualifient parfois de « Grand Satan », était en guerre contre l’Islam. Monsieur Obama propose aujourd’hui de faire la paix. Mais avec qui exactement ? Qui représente ce monde musulman auquel il s’adresse ? Les différents Etats et gouvernements qui structurent cette immense nébuleuse ? Mais ils sont en désaccord et personne n’a autorité pour parler en leur nom. La réactivation de la logique des blocs. Troisième conséquence de la nouvelle politique de la Maison Blanche : la bipolarisation du monde. Après l’effondrement de l’Union Soviétique et de ses satellites, le monde qui fonctionnait selon une logique d’affrontement des blocs, (la Guerre Froide) s’est retrouvé sans axe central, sans repère fort. Certain saluait la venue d’un monde « multipolaire » sans grande conviction. M. Obama vient de réactiver ce qui avait disparu : la bipolarisation du monde. Son adresse le prouve, il y a d’un côté le monde musulman et de l’autre l’Occident (auquel il faut sans doute ajouter les autres nations). Il est clair que le monde musulman prend ici la place du défunt bloc soviétique. L’Amérique s’est-elle enfin trouvée un partenaire digne de ce nom ? Pour une fois, la possibilité de dialogue, d’alliance entre deux blocs différents est clairement évoquée. Mais, revers de la médaille, que se passerait-il si cette tentative de la main tendue venait à échouer ? Les musulmans encensés aujourd’hui ne seront-ils pas stigmatisés demain ? Après l’intervention de M. Obama, la problématique politique d’un rapport entre deux mondes est posée ; la possibilité d’un dialogue ou d’un conflit ouvert avec le monde musulman ne peut plus être formellement exclu. Monsieur Obama vient (sans s’en rendre compte ?), de soulever le couvercle de la « boite de Pandore » auquel les dirigeants politiques des pays occidentaux avaient pris soins de ne toucher qu’avec d’infinies précautions. Enfin, conséquence immédiate de cette nouvelle politique : situer la solution au conflit qui oppose Israël aux palestiniens dans le champ de la relation à l’Islam, n’est-ce pas évacuer, a priori, toute possibilité de solution politique ? |