Les Kurdes face aux manœuvres du régime
Des promesses aux Kurdes pour diviser les opposants. Mais qui peut encore croire le régime ?
mardi 29 mars 2011 - 21h58, par
Selon un responsable kurde syrien, interrogé par "Radio Irak Libre" l’ambassadeur syrien à Washington, Imad Mustapha, est entré en contact avec un représentant du "Conseil national kurde syrien" aux Etats-Unis, ces derniers jours, afin de diviser l’opposition et de convaincre les Kurdes de ne pas rejoindre le mouvement de contestation.
Reprise par le site « Middle East Transparent », « Radio Irak Libre » affirme que l’ambassadeur syrien à Washington a pris une initiative historique, sans doute à la demande de Bachar Al-Assad, et a proposé aux représentants kurdes de maigres promesses. Il a affirmé que « le régime de Damas était disposé à naturaliser certains kurdes et à nommer un ministre kurde dans le prochain gouvernement ». Son interlocuteur a rétorqué que « les Kurdes sont solidaires avec le reste de la population syrienne dans ses revendications légitimes, dont notamment un règlement juste et définitif du problème kurde ».
En effet, depuis 1963 et l’arrivée du Baas au pouvoir, les Kurdes sont privés de leur nationalité, spoliés et expropriés. Leur terre est colonisée pour créer une « ceinture arabe » séparant l’ouest du Kurdistan (syrien) du nord (Turquie) et de l’est (Irak), afin d’empêcher tout rapprochement entre les trois composantes kurdes et d’étouffer toute velléité autonomiste ou indépendantiste. Le Baas a ainsi implanté des colonies de populations arabes dans le cadre de la politique d’arabisation forcée. Il a arabisé les noms des villes et villages, et imposé aux Kurdes l’attribution de prénoms arabes à leurs enfants. Ce n’est que la semaine dernière que la télévision d’Etat consacre, pour la première fois de l’histoire, des reportages aux célébrations de la fête kurde de Norouz (printemps), dans une tentative fragrante d’isoler cette communauté et de lutter contre toute propagation des contestations dans leurs régions (Hassaka, Qamichli, Deir Ezzor...).
Ainsi, craignant une convergence entre les Arabes et les Kurdes autour de la nécessaire chute du régime, Damas panique et doute. De ce fait, son ambassadeur Imad Mustapha a pris l’initiative de contacter des représentants de la communauté à Washington - étant donné que les Kurdes de Syrie sont plutôt en prison - pour les soudoyer et diviser les opposants. Or, ses promesses (naturalisation de certains kurdes et désignation d’un ministre) prouvent d’une part la fragilité du régime, et d’autre part ses capacités à renier 48 années d’une politique discriminatoire.
Faut-il encore que les Kurdes prennent ces promesses pour argent comptant et qu’ils acceptent de se faire berner une nouvelle fois. Sont-ils capables d’oublier les massacres de Qamichli et les souffrances de près de cinq décennies de discrimination ? Sont-ils prêts à troquer une cause de plusieurs millions d’habitants contre un ministre et quelques naturalisations ? Les jours à venir et l’ampleur de la mobilisation, à partir de vendredi prochain, devraient apporter la réponse.
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