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18 février 2008 1 18 /02 /février /2008 22:32

http://michelgurfinkiel.com/articles/159-

France/ Qui adoptera Charles Gurfinkiel ?

Aller à la rencontre d'un enfant asssassiné en 1942 ? Pourquoi pas. Mais sait-on bien ce que cela signifie ?



PAR Michel Gurfinkiel.

Qui adoptera mon frère Charles Gurfinkiel, né à Paris le 8 décembre 1933, raflé à Paris le 16 juillet 1942, déporté à Auschwitz par le convoi numéro 21 à la date du 19 août 1942, gazé sur place dès l’arrivée, avec 816 autres personnes dont 372 enfants de moins de treize ans ? Car c’est cela qui est en jeu dans le projet que le président de la République, Nicolas Sarkozy, a évoqué mercredi dernier au cours du dîner annuel du Crif. Les élèves de CM2 seraient invités à aller à la rencontre de jeunes destins assassinés. Non pas à travers un récit abstrait, mais en passant une sorte de pacte, de personne à personne, d’individu à individu, d’enfant à enfant, avec une ombre.

Ma première réaction : de quel droit ? De quel droit dispose-t-on de la mémoire de mon frère ?  Charles Gurfinkiel est devant moi tous les jours. Au sens propre. Sa photo – l’une des trois photos qui restent de lui – est sur mon bureau, en face de moi, au moment où j’écris ces lignes. Autrefois, elle était dans le petit atelier de mon père, juste en face de la machine à coudre. Un grand frère, mon aîné de quinze ans, qui est pourtant toujours un petit garçon, et le restera pour toujours. Ses yeux sont magnifiques. Son sourire, radieux. Cet enfant était aimé de ses parents, et le savait. Petit garçon, grand frère, dis-moi, de quel droit seras-tu « adopté » , au hasard d’une initiative gouvernementale ? Comme si tu n’as pas eu une famille réelle. Comme si moi, qui te regarde chaque matin et chaque soir, je n’existais pas ?

Ma seconde réaction ? Le président de la République et ses conseillers ont-ils mesuré ce qu’ils faisaient en imaginant un tel pacte ? Croient-ils que le petit enfant français de 2008 qui « adoptera » un petit Juif de France assassiné en 1942 passera ensuite, comme si de rien n’était, aux jeux vidéos ? Les forces de l’esprit existent, comme l’a confessé un autre président de la République. On peut tout envisager. Que le souvenir de Charles soit une source d’inspiration pour le petit garçon et la petite fille qui le reçoivent en héritage provisoire. Ou que l’enfant de 2008 rejette de toutes ses forces ce qui lui apparaisse comme une sorte de dibbouk, et veuille à tout prix s’en défaire.

Ma troisième réaction ? Charles, du haut de ses neuf ans, était à la fois un petit Juif exemplaire et un petit Français exemplaire. A l’automne 1940, juste après la promulgation du Statut des Juifs par le gouvernement de Vichy, il avait rossé de coups un camarade de classe qui l’avait insulté. Le directeur de l’école avait convoqué mon père : « Monsieur, je dois renvoyer votre fils pour vingt-quatre heures », avait-il commencé à lui dire, d’un air sévère. Avant d’ajouter, en lui serrant la main : «  Monsieur, vous avez un brave petit gamin. C’est avec des enfants comme ça que la France, un jour, renaîtra ». A ce titre, son destin peut être, en effet, un enseignement : contre la culture de renoncement que certains voudraient imposer.

Ma quatrième et dernière réaction ? Nous verrons ce qu’il en sera du projet présidentiel, et s’il prend forme. La bonne volonté et la sincérité de Nicolas Sarkozy ne sont pas en cause. L’homme que le suffrage universel – et Dieu – ont porté à la tête de la France est un ami véritable, sincère, du peuple juif et du pays d’Israël.  Si ce projet est mis en application, je m’engage à l’avance à recevoir l’enfant français inconnu qui « adopterait » Charles Gurfinkiel, 1933-1942. Que dis-je ? J’exige de le rencontrer. Je jouerai jusqu’au bout le jeu de l’histoire républicaine. Et gare aux tricheurs, quels qu’ils soient.

© Michel Gurfinkiel, 2008

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commentaires

M
Qui adoptera mes cousins Daniel et Bernard GOLDSTEIN, nés en France, mais gazés à Auschwitz le 5 aout 1944?<br /> Et bien, moi, je veux bien qu'on honore leur mémoire!<br /> Et je suis prête à aller voir les enfants qui désirent qu'on leur explique ce qui c'est passé!
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A tous nos chers lecteurs.

 

Ne vous est-il jamais venu à l'esprit d'en savoir un peu plus sur le titre de ce blog ?

Puisque nous nous sommes aujourd'hui habillés de bleu, il conviendrait de rentrer plus a fond dans l'explication du mot lessakel.

En fait Lessakel n'est que la façon française de dire le mot léhasskil.

L'hébreu est une langue qui fonctionne en déclinant des racines.

Racines, bilitères, trilitères et quadrilitères.

La majorité d'entre elle sont trilitères.

Aussi Si Gad a souhaité appeler son site Lessakel, c'est parce qu'il souhaitait rendre hommage à l'intelligence.

Celle qui nous est demandée chaque jour.

La racine de l'intelligence est sé'hel שכל qui signifie l'intelligence pure.

De cette racine découlent plusieurs mots

Sé'hel > intelligence, esprit, raison, bon sens, prudence, mais aussi croiser

Léhasskil > Etre intelligent, cultivé, déjouer les pièges

Sé'hli > intelligent, mental, spirituel

Léhistakel > agir prudemment, être retenu et raisonnable, chercher à comprendre

Si'hloute > appréhension et compréhension

Haskala >  Instruction, culture, éducation

Lessa'hlen > rationaliser, intellectualiser

Heschkel > moralité

Si'htanout > rationalisme

Si'hloul > Amélioration, perfectionnement

 

Gageons que ce site puisse nous apporter quelques lumières.

Aschkel pour Lessakel.

 

 

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