L'influence régionale de l'Egypte décline depuis des années. Pour couronner le tout, le président égyptien Hosni Moubarak vient de subir une ablation de la vésicule biliaire. A 81 ans, il s'est rétabli. Mais son absence temporaire a inquiété et accéléré les questions inévitables. Qui lui succédera le moment venu ? Que deviendra l'Egypte sans cet homme qui la dirige depuis plus d'un quart de siècle ?
Le devenir de l'Egypte préoccupe Israël en particulier. L'accord décisif qu'ont conclu les deux pays fait partie des succès majeurs de la diplomatie israélienne. Partie intégrante du processus de paix au Moyen-Orient, l'accord a initié un nouvel équilibre stratégique. Il esquisse une alternative dans le monde arabe, à l'heure où l'Iran s'engage sur la voie nucléaire. Tant que le parti national démocratique (PND) conserve les rênes de l'Egypte, l'état de paix devrait perdurer.
Une transition incertaine
Mais dans chaque régime autoritaire, la transition d'un dirigeant à un autre constitue une période incertaine. Elle le sera d'autant plus pour le régime égyptien, qui subit de plein fouet stagnation économique et déclin de son statut régional. Les élections législatives se dérouleront en novembre 2010 et les scrutins présidentiels l'an prochain. Moubarak a gouverné l'Egypte pendant près de 30 ans. Apprécié, l'homme n'a toujours pas officiellement exclu de se présenter une fois de plus à la tête du pays. Mais selon toutes vraisemblances, il devrait transmettre prochainement le pouvoir en vue de l'élection présidentielle prévue en septembre 2011.
Comme dans toute "république monarchique", son fils aîné Gamal devrait lui succéder. Mais cette passation n'est en aucun cas automatique.
En 2005, Moubarak consent à un amendement qui autorise la tenue d'élections présidentielles avec plusieurs candidats. Le régime réagit en emprisonnant Ayman Nour, le seul opposant crédible au président. De quoi compliquer la transition à venir.
Une opposition visible
Le paysage politique compte deux autres candidats potentiels. Omar Suleiman est le chef des renseignements. Il entretient des relations proches avec le milieu de la défense israélienne. A Jérusalem, beaucoup aimeraient le voir prendre la succession de Moubarak. Conscient des intérêts communs à Israël et à l'Egypte, il se montre inquiet face à la montée en puissance des ambitions nucléaires iraniennes et de l'islamisme dans la région.
L'autre candidat potentiel s'appelle Mohammed El-Baradei. Ancien chef de l'Association internationale de l'énergie atomique, il n'a guère de chances d'accéder à la présidence. Mais sa candidature risque de stimuler une opposition qui ne cesse de réclamer une réforme démocratique authentique. Réforme que le PND a toujours ignorée.
Lors des dernières élections législatives, le régime s'était imposé contre la seule opposition sérieuse, les Frères musulmans. Autorisée à ne disputer qu'un nombre limité de sièges au parlement en 2005, l'organisation panislamiste en avait remportés malgré tout 88 sur 454. C'est désormais impossible. En 2007, un amendement constitutionnel a été voté pour empêcher les islamistes de se présenter comme "indépendants" aux élections. Le régime du PND tente également de s'assurer la domination du parlement en travaillant à diviser l'opposition.
La fin d'une époque
Le succès devrait être au rendez-vous. En toute probabilité, le candidat présidentiel favori sera celui du régime. Ce qui voudrait dire qu'il est inutile d'espérer un changement radical dans la politique étrangère du Caire. Il n'est pas certain que le nouveau président parvienne à endiguer la stagnation interne et le déclin régional du pays. Il fut un temps où l'Egypte était l'arbitre incontesté de la diplomatie arabe. Aujourd'hui, elle se trouve marginalisée à l'heure où l'Iran et la Turquie étendent leur influence sur la région.
Le Moyen-Orient est en perpétuel changement. Les forces pro-américaines sont en déclin. Le régime égyptien est probablement assez fort pour résister aux tentatives iraniennes qui visent à le corrompre de l'intérieur. La présence égyptienne dans le camp des Etats-Unis reste vitale. Mais son rôle est davantage de bloquer l'avancée d'autres pouvoirs, plutôt que d'initier des processus. Quel que soit le résultat de la prochaine élection présidentielle, le Pharaon ne sera plus amené à jouer un rôle central au Moyen-Orient.
L'auteur est chercheur au Centre global de recherche en questions internationales, à Herzliya.