Moshé Ya’alon : Abbas ou l’épouvantail de septembre face à l’ONU
par Marc Brzustowski
Pour © 2011 lessakele et © 2011 aschkel.info
Mahmoud Abbas tempête, de façon inhabituelle, contre l’Administration Obama : il la rend directement responsable et comptable de la « politique raciste » de l’Etat d’Israël. Pire, il l’accuse, tout simplement, d’avoir « saboté le processus de paix » !. Le moins qu’on puisse dire est qu’Abu Mazen fait chauffer les turbines, dans l’art de détourner les faits pour tenter de rassembler ses soutiens à travers le monde : il en aura besoin, en vue de son happening, devant l’Assemblée générale de l’ONU, en septembre.
Le Comité exécutif de l’OLP a convenu que la réunion du Quartet à Washington, lundi, s’est soldée par un fiasco. Le « processus de paix » est au point mort et, finalement, Abbas n’attendait pas mieux pour lancer son offensive incertaine. Il en déduit que l’Amérique soutient Netanyahou et que le monde ne dispose donc plus que d’un unique outil pour freiner la « politique expansionniste » israélienne : la déclaration unilatérale, l’appel au boycott d’Israël sous toutes ses formes…. Et le refus de tout retour aux négociations.
Moshé « Booguy » Ya’alon s’est montré très circonspect, quant aux résultats que peut escompter ce front unilatéral palestinien. Sans en minimiser l’ampleur, il s’agit, selon lui, d’un de ces nombreux épouvantails sortis des placards de l’Autorité palestinienne. L’agitation dont fait preuve le cercle rapproché autour d’Abbas contient plus de menaces virtuelles que d’options réelles. Ces tactiques et manipulations visent à faire peur, sans être en mesure de soulever de véritable lame de fond.
Le Ministre des affaires stratégiques d’Israël sait qu’Abbas prend au sérieux le consensus américain au Sénat et au Congrès, qui, le cas échéant, suspendrait toute contribution financière en sa faveur. L’Administration Obama, au contraire, plaide pour la poursuite de cette assistance, tout simplement, parce que, dans la semaine qui suivrait, le Hamas serait en mesure de prendre le contrôle de toute l’infrastructure abandonnée à son sort par les USA.
De même, Abbas vitupère et menace officiellement, mais c’est, peut-être, la sensation angoissante d’être assis sur un siège éjectable qui ne demande qu’à décoller qui stimule une telle activité diplomatique, chez lui.
En matière de « délégitimation d’Israël », un certain nombre de cartouches récemment sorties du fourreau, se sont avérées être surtout des pétards mouillés : ainsi les fameuses flottille 2 et flytille ont surtout démontré le ridicule des antisionistes de tout poil, ne parvenant guère à franchir la moindre ligne jaune, ni à décoller des aéroports ou à s’éloigner trop loin des côtes. Mais il ne faut jamais mésestimer la perversité de ces campagnes : elles ont pour cible tout présence juive en Eretz et sur terre, de façon générale, aussi bien à Lod, Haïfa ou Ramleh que Paris ou Londres, et non le démantèlement de telle ou telle implantation, selon le discours officiel de l’OLP.
L’échec prévisible d’Abbas, se contentant d’une déclaration unilatérale symbolique, mais non-validée par le Conseil de Sécurité, signera vraisemblablement l’enterrement de première classe du « processus de paix ». Les Palestiniens auront alors joué leur va-tout pour tenter de détourner à leur profit le « printemps arabe ». Les capitales arabes ne les considèrent plus que comme quantité négligeable, face à l’ampleur des changements qu’il faudrait entreprendre au Moyen-Orient.
Les lignes de fracture se creusent entre les différents protagonistes majeurs de la région. Au-delà du discours anti-israélien, partagé par tous, les intérêts sont très divergents :
- la Turquie se rapprochait de l’axe irano-syrien, mais sent qu’il lui est préférable de rester neutre ou/et membre de l’Otan. Ankara fait pression humanitaire, non plus sur Israël, via le Mavi Marmara, mais contre Damas, avec l’ouverture de sa frontière aux réfugiés syriens. Erdogan prépare son armée à toute éventualité sur cette frontière incertaine, en protectrice des Musulmans menacés de massacres. Sa légitimité, même teintée d'hégémonisme, se colore de ce soupçon de démocratie qu'on ne saurait trouver chez aucun de ses voisins et alliés potentiels... Et ce n'est pas bon pour leur propre publicité.
- La Jordanie a surpris en s’opposant à toute déclaration palestinienne unilatérale. Mais, c’est tout simplement qu’elle se sait menacée de disparition et de coup d’état palestinien, dès qu’un état jumeau, animé par le Fatah et le Hamas, viendrait concurrencer le royaume hachémite, en chevauchant son propre territoire.
- L’Arabie Saoudite et les Emirats du Golfe ont intérêt à maintenir bon leur axe sunnite, de Riyad jusque par les voies maritimes qui assurent leurs exportations, via le Canal de Suez. Leur stratégie est celle de l'endiguement, et leur souci majeur : le nucléaire iranien, source de toutes les guerres futures au Moyen-Orient. Ce que les Occidentaux préfèrent ne plus regarder en face, ivres des premières senteurs de "Printemps".
- L’Egypte doit équilibrer ses rapports entre les deux clans, arabes sunnites et expansionnistes chi’ites, de Téhéran à Beyrouth, alors que la case Damas est la plus menacée par ce fameux « Printemps ».
Trop de paramètres peu favorables s’accumulent pour faire de ce mois de septembre le moment crucial d’un tournant stratégique de grande ampleur. Au contraire, les acteurs régionaux sont trop préoccupés par ailleurs pour offrir à Abbas et aux clans palestiniens toujours aussi divisés, autre chose qu’une manne symbolique sans conséquence sur le terrain.
Les bouleversements de ces derniers mois expliquent, en partie, la sensation qu’au-delà des discours, Israël n’est pas aussi isolé qu’il n’y paraît : les Grecs et même les Turcs l’ont démontré dernièrement, autour de ces flottiles qui ne virent jamais le large. Bulgarie, Roumanie et d’autres, telles que les anciennes républiques d’Asie Centrale : Turkménistan, Kazakhstan, Azerbaïdjan, sont aux premières loges et ont intérêt à tout, sauf à un nouveau séisme régional, qui ne ferait qu’en accentuer les failles et porter la région au bord du précipice…
L’Iran gagne du temps pour finaliser son programme nucléaire, instrument de tous les chantages planétaires et régionaux. Mais les soubresauts de Damas lui font également perdre un terrain précieux, nécessaire à son encerclement de l’Etat hébreu, qui sert à rendre ses menaces crédibles, vis-à-vis du reste du monde.
Abbas ne sait pas exactement quel chemin emprunter pour assurer sa survie politique au-delà de quelques mois. Mieux vaudrait, pour lui, qu’en sous-main, Israël et l’Amérique l'aide à se prémunir contre ses « amis ». Sachant que, de ses ennemis, il n’est toujours pas capable de se charger…
L'arme fatale de Mahmoud Abbas risque donc fort de rester : le reality-show aux effets fort nocifs pour la diplomatie internationale...